Les ONG dénoncent.

Opérations de rapatriement des migrants subsahariens

Les ONG dénoncent. ....

Le gouvernement algérien est appelé à «cesser de faire l’amalgame» entre la lutte contre le trafic et le terrorisme, «toute légitime 
quand il s’agit de la sécurité nationale, et à l’obligation du respect des droits des réfugiés et des migrants travailleurs».


Des ONG, des défenseurs et militants des droits de l’homme et des acteurs de la société civile ont lancé, hier, un appel pour dénoncer «fermement» les «opérations d’expulsions arbitraires» ciblant des milliers de migrants subsahariens, parmi lesquels des personnes en «extrême vulnérabilité».

«C’est la première fois qu’autant d’ONG se sont fédérées sur un sujet commun, celui des migrants, et particulièrement celui des expulsions massives des migrants subsahariens», signale Fouad Hassam, membre de la LADDH et un des initiateurs de l’appel. Lancées depuis 2014, les opérations de rapatriement des migrants des pays subsahariens se sont poursuivies ces derniers mois.
Selon les signataires de l’appel, depuis le début de l’année 2018, une «campagne généralisée d’arrestations arbitraires est suivie d’expulsions collectives et massives». Les opérations, précisent-ils, ont concerné des migrants de diverses nationalités, parmi lesquels des Guinéens, Burkinabès, Béninois, Maliens, Ivoiriens, Sénégalais, Nigérians, Libériens, Camerounais ou Sierra-Léonais.
Selon le document, alors qu’il n’existe aucun accord de réadmission ou de demandes formulées par les gouvernements de ces pays, à l’exception d’un accord «opaque» avec le Niger, plus de 1500 migrants ont été expulsés ces dernières semaines lors d’opérations «entachées d’abus et en flagrante contradiction avec le droit international des droits humains». Les signataires déplorent que les migrants soient «refoulés aux frontières sans aucune décision de justice, et au risque de leur vie».
Pour Fouad Hassam, le gouvernement algérien s’est «acharné» sur les Subsahariens en situation irrégulière, mais les arrestations ont touché des personnes en situation légale, des réfugiés et des demandeurs d’asile sous mandat et protection de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR).
Refoulement vers le Nord du Mali
«Pire, il y avait des jeunes étudiants et étudiantes qui se sont retrouvés à Tamanrasset embarqués comme des criminels, puisque l’immigration est considérée comme étant un acte criminel», dénonce Hassam, citant des sources parmi les migrants. Selon l’activiste, le dernier groupe de migrants a été expulsé les 12 et 13 mai du nord de l’Algérie et refoulé vers les frontières maliennes. «Le groupe a quitté le centre de rétention de Reggane vers la matinée du 16 mai.
La veille, les migrants avaient refusé de monter dans les camions pour aller vers les frontières maliennes, considérées comme dangereuses, et ils ont prié les autorités de les diriger vers le Niger. Ils avaient peur d’être pris dans les mailles des djihadistes et des réseaux criminels», poursuit-il.
Saïd Salhi, vice-président de la LADDH, qui rappelle la position du gouvernement nigérien de refuser de recevoir sur ses frontières des ressortissants d’autres nationalités, estime que l’Algérie «continue d’expulser des Subsahariens le long du trajet vers les frontières nigériennes et cela dans des conditions pénibles et en plein désert, selon de nombreux témoignages des migrants eux-mêmes, L’Organisation internationale des migrants (OIM) annonce avoir mené, cette année, 18 opérations de sauvetage des migrants sur les frontières algériennes». (voir entretien)
Faisant face aux critiques des ONG des droits de l’homme, le gouvernement algérien a précisé, en mars dernier, par la voix de son ministre de l’Intérieur, Noureddine Bedoui, que «l’approche de l’Algérie en matière de traitement du phénomène de la migration clandestine reposait sur le respect rigoureux des droits de l’homme, conformément aux traités internationaux ratifiés par l’Algérie et à la législation nationale relative aux conditions d’entrée, de résidence et de déplacement des étrangers en Algérie».
Sécurité nationale
M. Bedoui a précisé devant les sénateurs que quelque 500 tentatives d’entrée illégale sur le territoire national sont enregistrées quotidiennement aux frontières sud du pays. Le même responsable a annoncé, dans une précédente intervention, le démantèlement de plusieurs réseaux spécialisés dans l’émigration clandestine et le rapatriement dans leur pays de pas moins de
27 000 ressortissants depuis trois ans.
Estimant que l’Algérie «croit, d’un point de vue humanitaire, que les émigrés clandestins sont contraints de se rendre en Algérie et vers d’autres pays en quête de sécurité et de conditions de vie meilleures», M. Bedoui a déploré «l’exploitation par les réseaux criminels de ces migrants dans leurs entreprises criminelles». Selon lui, cela constitue une «menace pour notre sécurité et la stabilité de notre société».
Les signataires du document lancé par les militants affiliés à l’une des LADDH appellent le gouvernement au respect de ses engagements contenus dans les conventions internationales relatives aux droits des travailleurs migrants et aux droits des réfugiés, ainsi qu’aux recommandations de l’EPU et du Comité des travailleurs migrants (CWM), formulées récemment au siège des Nations unies à Genève.
Ils appellent à mettre en place un cadre légal national en respect des droits des travailleurs migrants et d’une loi d’asile «à même de permettre l’accès au statut de réfugié, et de leur protection à toutes formes d’abus ou d’exploitation». Le gouvernement algérien est appelé à «cesser de faire l’amalgame» entre la lutte contre le trafic et le terrorisme, «toute légitime quand il s’agit de la sécurité nationale, et à l’obligation du respect des droits des réfugiés et des migrants travailleurs».

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