Violences entre humains, il y a 200 000 ans ?
Publiée dans la revue PNAS, l'étude d'un crâne humain vieux de 150 à 200 000 ans et découvert en Chine dans les années cinquante, révèle une blessure que l'équipe internationale de chercheurs estime d'origine probablement... humaine.
Mais l'individu, manifestement soigné, a survécu à l'agression...
L'étude.
En réexaminant un crâne humain fossilisé vieux d'au moins 150 000 ans, trouvé dans une grotte près de Maba, en Chine méridionale, en 1958, une équipe dirigée par Erik Trinkaus, de l'Université Washington à St Louis (États-Unis), a constaté la présence d'une fracture, probablement consécutive à un coup porté à l'aide d'un outil de pierre, mais complètement guérie : la plus ancienne preuve documentée de la violence entre humains, suggèrent les auteurs.
Un fossile à l'identité incertaine.
Homme ou femme ? Cela n'a pu être clairement établi. Rongé (après la mort) par un animal (probablement un porc-épic), le crâne est amputé d'une bonne partie de sa face. Vivant au cours d'une période située entre – 200 000 et – 150 000 ans, l'individu, dont l'espèce est incertaine, appartenait, selon Erik Trinkaus, à un ‘continuum' de populations vivant à travers le continent eurasien, dont les Néandertaliens étaient les représentants occidentaux, et dont les hommes comme ce spécimen de Maba représentaient une forme physique orientale, peut-être liée aux Denisoviens, encore mal connus.
Une blessure sérieuse.
Le traumatisme, à la tempe droite, résulte d'un impact « très dirigé, très localisé », sans doute dû à un objet contondant, peut-être un galet, selon Trinkaus, qui reconnaît cependant : « un des problèmes est que ces gens menaient des vies rudes. Ils chassaient de près de gros et moyens animaux (...).
Ceux-ci ont tendance à ruer et à combattre - et beaucoup de ces animaux avaient des cornes ou des bois. Peut-on exclure totalement un accident de chasse ? Non, mais c'est moins probable (...) ».
« Il y a des cas plus anciens de bosses, de contusions et de traumatismes, mais c'est le premier que je connaisse où l'interprétation la plus probable est : ‘agressé par quelqu'un d'autre' (...) », reprend le scientifique.
Des réseaux d'entraide.
Vu la guérison complète de la blessure, l'homme (ou la femme) de Maba a survécu au moins des semaines ou des mois après avoir reçu celle-ci. « C'est encore un individu, parmi un nombre croissant de fossiles humains datant parfois de plus d'un million d'années, qui montre une survie à long terme avec des blessures graves ou des problèmes congénitaux », souligne le Pr Trinkaus.
Les chercheurs pensent que de tels indices montrent l'existence de soins et de réseaux de soutien au sein des groupes humains anciens. « Ils se frappaient l'un l'autre, ils se chamaillaient, et ils avaient des armes... Alors, ça devenait [parfois] sérieux, mais, dans le même temps, ils s'entraidaient », conclut le scientifique.
F. Belnet
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