LE PAYS TIENT DEBOUT MALGRÉ LES ATTENTATS : ASSEZ POUR SAUVER LE SOLDAT IBK EN 2018 ?














Dans moins d’un an, le Mali peut connaître une alternance. Car dans cette jeune démocratie sans sondages pour mesurer la popularité du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et l’adhésion à son action, le mécontentement semble grand dans les diverses couches de la société. 
Aux dires des fonctionnaires dans les ministères, des chauffeurs de taxi dans la rue, des vendeuses au marché ou des étudiants à la sortie de l’université de Bamako, le président IBK a perdu de son aura. Un conseiller à la Présidence, qui ne cache pas son inquiétude sur l’issue de la présidentielle de 2018, reconnaît que si IBK reste toujours bien perçu à l’international, ce n’est guère le cas au Mali où il n’a hélas pas été un président très engagé. 
Pire, bon nombre des membres de l’ADEMA, le plus grand parti du pays, allié du candidat IBK en 2013, n’estiment plus tabou, contrairement à certains barons de cette formation, l’idée d’un candidat qui défende ses propres couleurs, d’où la division prévisible à l’idée de soutenir en bloc le président sortant. 
Le RPM, formation politique de ce dernier, explique à qui veut l’entendre qu’IBK est son candidat naturel et va gagner cette présidentielle de 2018. Oubliant qu’une question cruciale se pose : avec quel bilan – jugé peu flatteur –, quelle stratégie d’alliances et quelle ligne politique ?

En quatre ans, regrette ce même conseiller, le président IBK n’a même pas visité la majorité des cercles du pays. D’autres rappellent que le fameux accord d’Alger accouché dans la douleur et signé en grande pompe le 20 juin 2015 avec la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) n’est qu’une « victoire sur le papier » pour un pays toujours en guerre asymétrique contre des groupes terroristes qui, en 2016, ont fait tuer 396 personnes, dont 207 civils, dans le centre et le nord du pays. 
Et au 31 mars 2017, on enregistrait déjà 250 tués, chiffre d’autant plus inquiétant que le pays en post-conflit héberge la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA), mission de maintien de la paix la plus dangereuse au monde selon certains experts, avec 114 pertes depuis 2013 (au moment où nous mettons sous presse). 

Pourtant, son mandat a été renouvelé trois fois et, depuis le 30 juin 2016, ses effectifs s’élèvent à 12 022 personnes, dont 10 732 militaires, 1 250 policiers et 40 experts, mais ces soldats de l’ONU ne parviennent toujours pas à être à la hauteur de la mission, puisque les attaques terroristes reprennent de plus belle.


LE PAYS TIENT DEBOUT MALGRÉ LES ATTENTATS : ASSEZ POUR SAUVER LE SOLDAT IBK EN 2018 ?



Éditorial

C’est dire que cette paix intra-malienne que tout le monde appelle de ses voeux n’est pas assez solide pour apporter la preuve de la restauration de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire. Sur la sécurité, le président IBK a grandement échoué. 
Et à en croire le sondage Mali-Mètre de l’institut dirigé par Friedrich-Ebert-Stiftung à Bamako, enquête qui prend le pouls de l’opinion malienne sur les gouvernants et leur mode de gouvernance, le retour de la paix et de la sécurité demeure le souhait ardent de 80,4 % des citoyens maliens, avec l’espoir porté sur l’emploi des jeunes pour 42,2 % d’entre eux et la relance de l’économie pour 24,2 %.

Justement, l’économie reste l’une des cartes majeures du bilan du président sortant. 
En quatre ans, non seulement le PIB s’est consolidé mais les bases d’une relance de l’économie ont été posées. La place bancaire de Bamako, avec 13 banques et 3 établissements, est le 3e système bancaire de la sous-région, juste derrière le Sénégal et la Côte d’Ivoire. Les emplois du système bancaire malien se sont établis en 2015 à 3 235 milliards de FCFA, soit une progression de 527 milliards (19,5 %) par rapport au 31 décembre 2014, embellie qui se retrouve aussi dans sa contribution accrue au financement de l’économie et l’augmentation de ses concours en faveur des entreprises et des particuliers. 

En outre, au Fonds monétaire international (FMI), on estime que le gouvernement continue de faire des progrès dans la mise en oeuvre de son programme économique. 
La croissance est robuste – plus de 5 % attendus en 2017 – et, malgré les conditions de sécurité difficiles, le pays tient debout. La croissance, comme l’année dernière, est essentiellement tirée par le regain de vitalité de la production agricole et les bonnes performances du secteur des services :transport, communication, commerce, banques, etc. Ces avancées économiques pourront-elles suffire à sauver le soldat IBK à la présidentielle de 2018 ? Telle est la question...
Par Nicolas Delecourt

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