L’ÈRE DE LA VITESSE : L’ENNEMIE DU TEMPS ?


L’ÈRE DE LA VITESSE : L’ENNEMIE DU TEMPS ?

Après des milliers d’années sans réel mouvement, on observe aujourd’hui une réelle croissance de nos inventions humaines qui jouent un rôle décisif sur les mentalités que l’on connaît aujourd’hui. Nous voulons aller toujours plus vite, toujours plus loin. Nous sommes dans une accélération croissante. Mais avons-nous vraiment conscience des conséquences d’une telle prise de vitesse ?
Aujourd’hui, tout va peut être un peu trop vite pour nous. Et il existe un exemple bien concret qui représente aujourd’hui notre conception de la vitesse.
Internet est probablement l’une des inventions les plus notables de l’Homme. Internet tel qu’on le connaît aujourd’hui, nous permet d’entrer en contact avec n’importe quelle personne sur la Terre qui est elle aussi connectée à un réseau. On peut tout savoir sur tout, en seulement quelques secondes.

Avec Internet, tout le monde sait tout, très vite.
Il n’y a même pas 50 ans, lorsqu’on souhaitait se renseigner sur quelque chose, il fallait se déplacer jusqu’à la bibliothèque municipale, trouver le bon ouvrage et chercher la bonne page qui saurait nous renseigner. Aujourd’hui, grâce aux bons mots-clés, on peut trouver cette page en un quart de seconde, ainsi que des centaines d’autres informations relatives à ce que l’on cherche. Internet est un gain de temps énorme pour l’Homme. C’est d’ailleurs ce qu’il a toujours cherché à faire : gagner du temps. Et aujourd’hui il y arrive de mieux en mieux grâce à tous les moyens technologiques actuels mais aussi grâce à tout l’héritage de son passé culturel qui voyage à travers les âges.
Le gain de temps, la vitesse, c’est chercher la facilité.
C’est rendre sa vie beaucoup moins compliquée, moins fatigante. L’invention de la roue (3500 avant notre ère) n’est rien d’autre qu’un gain de temps. Une roue posée sous une brouette permet de transporter beaucoup plus de choses en un seul trajet. Des années plus tard, des roues ajoutées à un carrosse permettent de transporter des marchandises et des hommes sur de plus longues distances.

Aujourd’hui, mon smartphone m’indique l’heure, me renseigne sur la météo à Prague, sur le temps de trajet Paris-Bruxelles et me maintient en contact avec le monde entier… Tout ça en maximum 30 secondes, le temps que je change d’applications. Mieux encore, je peux même avoir toutes ces informations affichées sur mon écran d’accueil et les consulter en une seconde. Selon la loi de Moore, aujourd’hui, tous nos appareils évoluent tous les 18 mois (mises à jour, nouveaux produits, etc). Imaginez à quelle vitesse tout va se dérouler d’ici une cinquantaine d’années.
Le gain de temps est tout à fait honorable de manière générale. Cela nous permet de faire beaucoup plus de choses que nos ancêtres ne pouvaient se permettre. Mais la notion de facilité n’est pas que bénéfique.
Si elle nous permet de nous développer au niveau de la croissance démographique, économique, scientifique, etc., nous avons cependant pris des habitudes qui peuvent nous être néfastes à long terme.


Nous sommes devenus vraiment impatients. Nos générations actuelles vivent dans la précipitation et le stress permanent. La société de consommation ne nous aide clairement pas à freiner la cadence, au contraire. Il en faut toujours plus, et toujours plus vite, peu importe les moyens employés. 
L’homme n’attend plus. Il n’a plus le temps d’attendre.

Il veut aller plus vite que le temps lui-même.
Aujourd’hui, l’homme pressé qui n’a plus le temps s’énerve d’impatience.
Qui n’a jamais pesté en voyant que son métro arrivait dans 10 longues minutes ?
Qui ne s’est jamais emporté contre son ordinateur figé par sa surcharge de travail ?
Ce n’est pas le temps qui nous contrôle, comme certains l’imaginent.
C’est la vitesse que nous avons engendré et qui nous fait vivre en accéléré.
Peut être croit-on que si l’on vit plus vite, on vit plus de choses ?
Peut être. Mais les vit-on pleinement ?
Les vit-on comme on les vivait il y a 500 ans ?
Nos ancêtres étaient sans aucun doute beaucoup moins anxieux et certaines des maladies psychologiques que l’on connaît aujourd’hui n’étaient que trop rare il y a des centaines d’années. Très certainement parce qu’ils prenaient leur temps sans avoir peur de le perdre.
Le temps a des bienfaits sur l’homme et l’humanité en général qu’aucune autre valeur ne peut atteindre.
C’est grâce au temps que l’homme évolue. Jamais une révolution ne s’est faite du jour au lendemain. Les périodes ont bien entendu varié : certaines révolutions ont connu leur tournant plus rapidement que d’autres. L’homme pense, réfléchit, se remet en question et change même d’avis en fonction du temps. Nous ne sommes des ordinateurs pouvant ingérer des milliards d’informations en quelques secondes. Notre pensée a besoin d’être malaxée, traitée, analysée plusieurs fois à travers notre cerveau. La réflexion, c’est elle qui fait ce que nous sommes et qui nous différencie des autres.
Malgré toutes les performances technologiques acquises au cours de ces dernières années, je doute que la vitesse de la réflexion humaine augmente à la hauteur de nos super-ordinateurs. Si tel était le cas, je ne pense même pas que cela serait une bonne chose : Où seront passés nos sentiments et nos ressentis si nous nous mettions à réfléchir et prendre des décisions en un quart de seconde ?
Ce sont également les sentiments qui nous définissent en tant qu’êtres vivants et non en machines.
À nouveau, le gain de temps n’est pas non plus efficace en ce qui concerne nos guérisons émotionnelles. C’est le temps, les jours et les mois qui passent, qui nous aident à guérir d’un traumatisme comme une rupture amoureuse, le décès d’un être aimé, ou tout autre expérience désagréable dans la vie d’un homme. Vouloir aller plus vite que nos émotions entraînent chez nous une frustration bien connue qui s’extériorise sous la forme de colère, de dépression ou de mal-être général.
Le temps est une vertu qu’on ne peut pas laisser de côté. Le temps panse les plaies, il souffle doucement sur les souffrances, apaise les maux et renforce l’esprit fragile.
Le temps nous fait bien grandir.
C’est pour ça que nous avons un âge et que nous avons une maturité différente à 4 ans et à 40 ans. Notre cerveau se développe avec notre corps, ainsi que toute la vie autour de nous. Tout est en perpétuel changement.
Pourquoi ne pas prendre le temps ?
Je crois que parfois, cela fait énormément de bien de se poser. De s’éloigner de toute cette précipitation ambiante qui chamboule nos sens. De prendre une journée, une semaine, un mois. De prendre le temps. De faire comme nos ancêtres avant nous, dans la nature, regarder les étoiles en se posant des questions ou en ne faisant tout simplement rien de précis. 

Je crois qu’on ne perd jamais vraiment son temps.
Toute seconde, heure, année passée sur un projet sera bénéfique sur le court ou long terme. On connaît tous ces histoires de chercheurs, ingénieurs qui passèrent leurs vies à démontrer des théories existentielles et dont les découvertes n’ont abouties que des années après leur mort, lorsque leur travaux auront été repris par d’autres et les auront aidé à trouver la réponse existentielle au problème initialement soulevé. On connaît aussi ces histoires où l’on a suivi une formation particulière avant de se rendre compte qu’elle n’était pas celle que nous voulions vraiment faire.

Nous devions alors recommencer une nouvelle formation après parfois des années d’études qui n’auront servis « à rien ».
À rien, vraiment ?
N’avons-nous pas approfondis certaines connaissances précises ou de culture générale pendant ces années ?
Rien n’est perdu, et surtout pas notre temps.
On connaît encore ces histoires de relations amoureuses ou amicales, qui n’ont pas duré.
On croit avoir perdu du temps avec ces gens.

En réalité, ces gens nous font grandir et nous permettent de définir qui nous sommes réellement, de savoir ce qu’on veut vraiment ou pas. Ils nous enrichissent mentalement, que nos expériences avec eux soient bonnes ou mauvaises.
Nous avons le temps. 
Le temps d’une vie. 
Et c’est déjà immense pour que chacun y accomplisse de grandes choses. 
La vitesse nous aide à accomplir ces projets de vie au niveau pratique et matériel, mais elle ne nous est pas utile sur le plan de la réflexion personnelle. C’est à chacun de prendre le temps qu’il lui faut pour résoudre ses conflits intérieurs.
L’immortalité deviendra bientôt accessible grâce aux progrès de la science et de la médecine. 
Déciderons-nous alors enfin de prendre le temps ?

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