Vers l’abolition de la peine de mort au Maroc ?


Vers l’abolition de la peine de mort au Maroc ?



Le Ministre de la Justice, Mohamed Aujjar, a assuré ce week-end que le Royaume optera pour l’abolition de la peine capitale « dans un futur proche ». 

Un pas de géant dans un pays qui a longtemps joué la carte de l’ambiguïté sur la question.

Ce week-end se tenaient à Rabat les travaux de la 5e assemblée générale de la Coalition marocaine contre la peine de mort sous le signe de la « Mobilisation continue pour l’abolition de la peine de mort ». À cette occasion, et intervenant lors de la séance d’ouverture de l’assemblée générale, le ministre de la Justice Mohamed Aujjar a confirmé que le Maroc - en conformité avec la tendance mondiale sur l’abolition progressive de la peine de mort - s’inscrit entièrement dans cette logique et qu’il y adhérera dans un futur proche. « Le ministère de la Justice a tenu à mentionner explicitement dans le projet de loi pénale que la peine de mort doit être remplacée par la peine la plus sévère pour un acte identique », a déclaré Mohamed Aujjar comme le rapportent nos confrères du Site info. Ce dernier a souligné que le Maroc avait adopté « une approche restrictive » de la peine de mort. « Le législateur marocain a mis en place un ensemble de restrictions légales à la peine de mort conformément aux dispositions de la loi de procédure pénale en vigueur et de son projet de révision et d’application. L’amnistie royale joue un rôle important dans le rééquilibrage de la politique punitive en transformant de nombreuses condamnations à mort en peines de réclusion à perpétuité ou en emprisonnement à durée déterminée. Entre 2000 et 2018, ce sont 118 cas au total qui en ont bénéficié », a précisé le ministre de la Justice.
De plus, la recrudescence des crimes terroristes et l’augmentation du crime organisé et transfrontalier expliqueraient la décision de l’abstention du Maroc lors du vote international sur la peine de mort en décembre dernier. « L’abolition de la peine de mort pourrait être réalisée avec le temps, grâce aux actions collectives en ce sens, à l’évolution des mentalités locales, ainsi qu’une prise de conscience quant aux droits de l’Homme », a conclu le ministre.
Une position marocaine ambiguë

En décembre dernier, les Nations Unies avaient invité tous les pays non abolitionnistes, dont le Maroc, à tourner définitivement la page de la peine capitale. Même si la peine de mort n’est plus appliquée dans le pays depuis l’affaire de « L’Haj Tabet » en 1993, le Maroc a toujours refusé de l’abolir de manière officielle, quitte à garder les prisonniers dans les couloirs de la mort indéfiniment. 

Comme le rappellent nos confrères du Huffington Post, en 2018 ce ne sont pas moins de huit condamnations à mort qui ont été prononcées dans le Royaume. 

Quinze autres condamnations à la peine capitale ont été émises par les tribunaux des différentes régions du Maroc contre six l’année d’avant. Aujourd’hui, environ 92 prisonniers se trouveraient dans le couloir de la mort. Mais malgré les chiffres et les appels du pied des Nations Unies le Maroc choisira, au moment du vote, de ne pas se prononcer sur la question, comme lors des six dernières sessions. Une abstention que l’Organisation Marocaine des Droits de l’Homme (OMDH) regrettera dans un communiqué, assurant que la position du Maroc va à l’encontre des droits constitutionnels. 

En effet, l’article 20 de la constitution marocaine souligne que « le droit à la vie est le droit premier de tout être humain. La loi protège ce droit ».

Autre obstacle et non des moindres : le ministre d’État en charge des Droits de l’Homme, Mustapha Ramid, en personne. 
En effet, à ses débuts, le patron du département des droits de l’Homme n’a jamais caché son rejet de l’abolition de la peine de mort, quitte à menacer de démissionner de son poste dans le cas où le Royaume opterait pour la suppression totale de cette peine. 
Une position qui a toutefois quelque peu évolué avec le temps, puisque Mustapha Ramid préconise aujourd’hui de continuer à réduire le champ d’application de la peine capitale, même s’il reste convaincu que la seule réponse à certains crimes reste la peine capitale. 

C’est le cas notamment des crimes qu’il qualifie de « très graves et cruels » comme l’enlèvement, le viol et l’assassinat des enfants.

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