Le retour de la « bolitik »…
Si l’on s’achemine vers l’élargissement progressif du déconfinement, prélude à la levée de l’état d’urgence sanitaire, (le 10 juillet ?), une « veille dame », la politique, s’apprête à revenir au-devant de la scène.
En effet, celle-ci devrait être pleinement présente lors de la présentation et de la discussion du projet de Loi de Finances rectificative dans les jours à venir dans l’enceinte bicamérale du Parlement, car il y a fort à prévoir que les partis représentés, majorité comme opposition, ne manqueront pas en cette occasion de « donner de la voix »…
Une démarche normale et salutaire car si la COVID-19 a brutalement stoppé les circuits économiques, elle n’a eu pratiquement aucune emprise sur les comportements politiciens, à la précision près que durant plus de quatre-vingt-dix jours, on a pu constater une certaine retenue politicienne inspirée sans nul doute par la gravité de la situation et les craintes que cette pandémie pouvait inspirer.
Mais, désormais, en sus de l’action parlementaire, on prend la mesure que des calculs et des scenarii se font jour, le plus souvent en dehors des champs habituels du discours politique.
C’est ainsi qu’ici et là, des propositions fusent qui ne sont pas, le plus souvent, « constitutionnellement » correctes et que la juriste-constitutionnaliste Nadia Bernoussi a d’ailleurs vite fait de rejeter récemment avec pertinence.
Certains, dans cette nébuleuse politicarde, proposent donc la dissolution du gouvernement El Othmani 2 et son remplacement par une escouade de technocrates qui serait mieux à même d’apporter les meilleures solutions pour affronter l’après-coronavirus.
Cette volonté d’un retour des technocrates à l’exercice du pouvoir exécutif est un marronnier qui revient régulièrement, et qui porte en lui une détestation incontestable des partis politiques.
On ne saurait soutenir une telle position tant elle est antinomique avec l’ordre constitutionnel et institutionnel qui habille le Royaume, sachant qu’en outre, un bon technocrate peut rapidement se parer d’une toge partisane comme le montrent des exemples bien précis au sein de l’actuelle équipe gouvernementale…
En outre, alors qu’il s’agit de réconcilier l’opinion publique avec les partis qui ont pour mission, notamment, d’encadrer la population, une telle formule, hasardeuse bien sûr, aboutirait exactement au résultat contraire !
La seconde des propositions farfelues voudrait que l’on repoussât les élections, législatives entre autres, afin d’affronter les affres du redémarrage de l’économie et les problématique sociales assurément des plus délicates.
Une telle approche, anti-constitutionnelle également, aurait pour effet de donner un blanc-seing à l’actuelle équipe que dirige le PJD, alors que la cohésion et l’unité ne sont pas ses qualités premières.
Un gouvernement d’union nationale pourrait ainsi lui succéder, mais dans quel but, sinon de doter de maroquins ceux qui désespèrent depuis des mois et même des années d’en obtenir…
Construire une unanimité politique nationale peut parfaitement se réaliser, au niveau de l’enceinte parlementaire notamment, sur des questions bien précises et à partir d’un débat ouvert et large sans pour autant évoquer une « union sacrée » qui n’a pas lieu d’être en dehors des sujets liés à la Question nationale et à l’intégrité territoriale du Royaume.
Comme le prouvent à l’envi les pratiques suivies dans des pays proches, la pandémie n’a pas mis fin aux jeux politiques et à la confrontation des idées, mêmes si les forces partisanes de ces voisins ont su mettre en sourdine, en plusieurs occasions, leurs divergences à des moments cruciaux.
La France, par exemple, n’a-t-elle pas pris le pari de tenir un second tour de ses élections municipales prévu pour le 28 juin prochain ?
Le Maroc, également, ne fera pas l’économie d’une approche légale et régulière des échéances électorales qui arrivent car, in fine, les citoyens devront avoir le droit de porter, par leurs bulletins de vote, un jugement clair sur la gouvernance de l’équipe El Othmani, ses acquis et ses échecs.
De plus, en accompagnement de la crise sanitaire, plusieurs forces politiques ont marqué de leurs propositions et options, notamment le Parti de l’Istiqlal, le PPS ou même, dans une moindre mesure l’USFP, et ces démarches mériteraient pleinement de connaître la sanction des urnes.
Enfin, sachant que le gouvernement et sa majorité actuels sont le résultat de compromis tirés au forceps, forcément insatisfaisants, on imaginera que les prochaines législatives permettront de dégager des majorités cohérentes et homogènes.
Voilà pourquoi, Covid ou pas Covid, la politique et ses pratiques positives, (elles peuvent exister certainement), doivent reprendre leurs droits !
Par Fahd YATA
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