Covid-19 et vaccin russe Spoutnik-V : Des résultats pas entièrement rassurants du tout.

Covid-19 et vaccin russe Spoutnik-V : Des résultats pas entièrement rassurants du tout.


RUSSIA'S HEALTH MINISTRY/AFP - DMITRY KURAKIN

Le vaccin est composé de deux doses, chacune avec un vecteur viral différent.
Les résultats des phases 1 et 2 de l’essai clinique du vaccin russe contre le Sars-CoV-2, Spoutnik-V, ont été publiés un mois après avoir été annoncés, montrant un bilan encourageant, mais soulevant des vives inquiétudes.


Comme une fusée ! Le 11 août 2020, le président russe Vladimir Putin a surpris la planète entière en annonçant la validation d'un vaccin contre le virus responsable du Covid-19, SARS-CoV-2, vaccin qui devenait donc le premier au monde à avoir franchi cette étape. 
Un mois après cette annonce éclatante, les chercheurs du centre de recherche russe Gamaleya ont enfin publié les résultats des phases 1 et 2 de l'essai clinique de leur vaccin Spoutnik-V, dans le journal médical The Lancet.


Ces études suggèrent que le vaccin entraîne une réponse immunitaire forte et ne cause pas d'effet secondaire majeur. 
Mais malgré ces résultats encourageants et l'optimisme affiché par les chercheurs russes, il n'est pas encore certain que ce vaccin serait en effet protecteur contre le virus ni sûr pour la santé des personnes vaccinées. En outre, certains experts montrent leur inquiétude au sujet des données présentées dans l'article, soupçonnant une possible manipulation des résultats.
Que dit l’étude sur Spoutnik-V ?

Les deux premières phases de l'essai clinique ont été réalisées en parallèle dans deux hôpitaux de Moscou (l'hôpital Burdenko et l'université Sechenov) avec un total de 76 participants (38 dans chaque centre). Précédemment, les chercheurs avaient révélé que le vaccin utilisait deux adénovirus (virus à ADN), rAd26 et rAd5, qui contiennent le gène codant la glycoprotéine S du virus SARS-CoV-2 (qui forme la couronne du coronavirus).


"Nous travaillons avec cette technologie (les adénovirus, ndlr) depuis 25 ans, ce sont des virus qui rentrent facilement dans l'organisme et permettent le transfert de matériel génétique vers les cellules du corps, qui, suite à l'infection, accumulent ces protéines S sur leur surface, ce qui permet l'activation du système immunitaire", expliquait Alexander Gintsburg, directeur du centre Gamaleya lors d'une conférence de presse le 20 août. 

"Le but d'utiliser deux types d'adénovirus est de tromper le système immunitaire : le corps peut produire des anticorps contre le premier adénovirus, mais ne reconnaîtra pas le deuxième, ainsi davantage de cellules pourront être infectées pour exprimer la protéine S", ajoutait Denis Logunov, directeur du groupe de recherche qui a produit le vaccin.


Selon les résultats de l'article, cette approche aurait fonctionné, car les participants ayant reçu les deux adénovirus (avec un intervalle de 21 jours) affichaient une réponse immunitaire bien plus importante que ceux ayant reçu seulement un des deux composants du vaccin. 
Et même si la totalité de participants avait développé des anticorps spécifiques contre cette glycoprotéine S, seulement l'administration des deux doses assurait la génération d'anticorps neutralisants dans l'ensemble de personnes vaccinées. Cette double vaccination semble efficace, car elle entraîne la production de ces anticorps neutralisants et aussi la prolifération de cellules immunitaires, y compris des lymphocytes T cytotoxiques (CD8), qui détruisent les cellules infectées, et des lymphocytes T auxiliaires (CD4), qui modulent la réponse immunitaire. 

Finalement, elle induit la sécrétion d'interféron gamma, cytokine produite par ces lymphocytes qui joue un rôle essentiel dans la réponse immune. Niveau sureté, aucun de participants n'aurait développé d'effet secondaire majeur, mis à part des effets communs aux autres vaccins (fièvre, maux de tête, douleur au site d'injection).

Quelles sont les limites de cette étude ?

Malgré ces résultats très positifs, le suivi a été très court (42 jours), et le nombre de participants très bas (76 au total, mais seulement 40 ont reçu les deux doses du vaccin). Aussi, ces participants sont très homogènes : des hommes (70 %), blancs (97 %) et jeunes (moyenne d'âge autour de 27 ans). Donc il est impossible de dire si le vaccin est en effet sûr et il faudra des études bien plus larges pour le vérifier, comme l'admet Kirill Dmitriev, président du fonds d'investissement du gouvernement russe (RDIF), qui a financé cette recherche : "Nous espérons qu'il n'y a pas d'effet secondaire à long terme, mais nous ne le savons pas encore. Nous allons le tester chez 40.000 participants lors de la phase 3 de l'étude".


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