Fake News et Désintox : La photo du nourrisson secouru à Ceuta ou en Turquie ?
Depuis quelques jours, la photo montrant un secouriste espagnol venant en aide à un nourrisson circule abondamment.
Devenue virale, elle a été confondue avec des opérations précédentes en Turquie et reprise comme telle par certains médias.
Le secouriste Juan Francisco sauvant un nourrisson à Ceuta / Ph. Garde civile espagnole.
En pleine guerre d’images et de déclarations après l’exode de plus de
8 000 personnes vers Ceuta, par voie maritime ou terrestre, la
confusion s’est installée concernant certaines opérations de sauvetage.
Parmi elles, celle poignante où l’on voit un nourrisson entre les mains
d’un secouriste en mer. Devenue virale et circulant largement sur les
réseaux sociaux, avant d’être reprise par les médias espagnols, la photo
a été présentée au Maroc comme étant une «fake news», celle d’une
intervention des secours en Turquie.
Prenant le soin de ne pas sourcer leur «fact-checking», plusieurs comptes marocains sur les réseaux sociaux se contentent de diffuser machinalement le même screenshot (copie d'écran) pour dénoncer la manipulation par les Espagnols. Il est pourtant indiqué en langue turque, qu'«une femme (kadin) tombée en mer a été secourue». De même, les vignettes sur la copie d'écran ne correspondent pas à la photo du secouriste de Ceuta, la bouée orange étant le seul élément commun. Une recherche rapide permet de remonter à la vidéo d'origine citée dans le screenshot
A l’origine, avant d’être relayée par les médias espagnols, la photo a été mise en ligne le 18 mai par la Guardia civil elle-même, qui a rendu hommage au courage de son agent. En légende, elle souligne que les secouristes sont intervenus auprès de «dizaines de mineurs arrivés en mer avec leurs familles».
Dans d’autres illustrations moins rapprochées, on arrive à distinguer le bébé, la bouée et l’agent à partir d’un autre angle, qui permet de distinguer aussi des membres des secours espagnols près de mineurs, dans la partie rocheuse de la côte de Ceuta.
Le secouriste en question témoigne
Certains médias espagnols sont partis à la rencontre du secouriste pour raconter l’histoire derrière la photo devenue iconique. L’homme s’appelle Juan Francisco, membre du Groupe spécial des activités sous-marines de la Garde civile (GEAS), actuellement en poste à Ceuta. Présenté comme un héros, il indique avoir bien participé aux opérations de sauvetage en mer, pour assister ceux qui ont traversé la frontière en contournant le brise-lames de Tarajal. Le bébé est «âgé d’à peine deux ou trois mois, vêtu d’un pyjama rayé blanc et rouge, un bonnet bleu sur la tête et des mitaines à la main», note le site d’information NIUS Diario.
Sur Tele Cinco, Juan Francisco dit avoir repéré d’abord la maman, «à peine capable de rester à flot sur une petite bouée, avec ce qui ressemblait à un paquet, un sac à dos, attaché à son dos». C'est en nageant vers elle, qu'il découvre que c'était un bébé. «Ce n’était pas le seul enfant que j’ai recueilli de la mer», a-t-il encore déclaré, d’une voix visiblement émue. Son témoignage est recueilli également par la radio Cadena SER.
«En mer, nous nous sommes aperçu d’une tête de bébé qui dépassait (…) Quand je l’ai pris dans mes bras, je ne savais pas s’il était encore en vie, son cou se courbait et il avait froid. La seule chose que j’ai faite est de rentrer le plus vite possible pour que le bébé ne soit pas en contact avec l’eau et pour atteindre la terre ferme.»
Des opérations coordonnées avec la Croix-Rouge
Lors de l’émission «El programme de Ana Rosa» sur Tele Cinco, Juan Francisco est présenté comme ayant «sauvé la vie de nombreux bébés dans les eaux de Ceuta». «L’image de l’agent, avec l’enfant dans ses bras sur l’eau, a fait le tour du monde et rappelle désormais ce moment émouvant», indique la cinquième chaîne.
D’autres collègues de Juan Francisco et des agents du Groupe de réserve et de sécurité (GRS) ont pris part à l’opération pour évacuer la maman du nourrisson ainsi que des dizaines de mineurs. Des parents parmi ceux sauvés se seraient jetés à la mer ou utilisé des embarcations pneumatiques ayant lâché en cours de chemin. «Certaines femmes portaient plusieurs enfants», décrit encore Tele Cinco.
NIUS Diario rapporte pour sa part les propos d’Isabel Brasero, porte-parole et responsable de la communication de la Croix-Rouge. Selon elle, «la plupart de ceux arrivés sont des femmes et des enfants. Ils étaient épuisés, certains souffrant d’hypothermie».
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