Liberté de la presse : Les juges connaissent-ils la Constitution ?
Déclic - Le Tournant
Ces dernières semaines, notre pays a été marqué par plusieurs procédures judiciaires entravant la liberté de la presse.
Des décisions qui outrepassent des articles de la Constitution belge. Se dirige-t-on vers la censure ? Analyse avec Jacques Englebert, professeur de droit à l’ULB et avocat spécialisé dans le droit des médias et Martine Simonis, Secrétaire générale de l’AJP, les invités du Tournant. .
La Constitution belge protège la liberté de la presse en interdisant explicitement la censure dans son article 25. "La presse est libre ; la censure ne pourra jamais être établie". Pour maintenir un regard sur le travail des journalistes, il est établi que des poursuites sont possibles a posteriori, si des fautes ont été commises.
Des recours sont possibles auprès du Conseil de déontologie journalistique (CDJ) et puis éventuellement aussi devant les tribunaux.
Or, récemment, le journal Le Soir a été interdit par la justice de publier un article, avant même qu’il ne soit en ligne, sur l’élu verviétois, et désormais bourgmestre, Maxime Degey.
Un cas avéré de censure comme l’explique Jacques Englebert : "La censure, c’est la mesure a priori, qui empêche l’information d’être diffusée. Donc quand on va en référé, encore plus dans le cadre d’une procédure unilatérale sans permettre aux médias de s’exprimer, et qu’on demande à un juge d’interdire à un média de diffuser une information, on est en plein dans la censure".
Deux autres cas récents de censure de la presse en Belgique, perdus en appel
Et ce type de décisions judiciaires, et donc d’entraves à la Constitution, se sont multipliées ces dernières semaines. VTM et Het Laatste Nieuws ont ainsi été poursuivis dans le cadre de l’affaire des propos racistes de Conner Rousseau au nom du secret de l’instruction, même raison invoquée aussi par la ministre de l’Intérieur et un policier qui souhaitait que ni son nom ni son image ne soient cités dans le cadre du Qatargate, demandant ainsi la suppression d’une série d’articles de Sudpresse, mais aussi de ne plus jamais être le sujet d’un article à l’avenir.
Dans le premier cas, la cour d’appel de Gand a donné raison aux deux médias, après deux décisions rendues par les tribunaux de première instance, en rappelant que la censure préventive n’est pas autorisée. Concernant l’affaire du Qatargate, la juge a encore été plus claire comme l’explique Martine Simonis : "On n’a pas toujours des décisions qui vont dans le mauvais sens. La juge dit 'Je rappelle que visiblement vos demandes sont contraires à la Constitution et je les considère même comme téméraires'. Autrement dit : cette action n’aurait jamais dû être menée, et certainement pas devant mon tribunal". L’avocat spécialisé dans le droit des médias s’insurge d’autant plus que dans cette affaire, la demande émane de l’Etat fédéral : "Vous demandez qu’on interdise à l’avenir à un média de parler de tel sujet de façon absolue. Et c’est évidemment dramatique qu’une telle demande soit portée par un ministre fédéral qui doit connaître la Constitution".
L'article 25 de la Constitution oublié (ou outrepassé) par les juges
Dans le cadre de la plainte de Maxime Degey, c’est la protection de la vie privée qui est invoquée.
Or, récemment, le journal Le Soir a été interdit par la justice de publier un article, avant même qu’il ne soit en ligne, sur l’élu verviétois, et désormais bourgmestre, Maxime Degey.
Un cas avéré de censure comme l’explique Jacques Englebert : "La censure, c’est la mesure a priori, qui empêche l’information d’être diffusée. Donc quand on va en référé, encore plus dans le cadre d’une procédure unilatérale sans permettre aux médias de s’exprimer, et qu’on demande à un juge d’interdire à un média de diffuser une information, on est en plein dans la censure".
Deux autres cas récents de censure de la presse en Belgique, perdus en appel
Et ce type de décisions judiciaires, et donc d’entraves à la Constitution, se sont multipliées ces dernières semaines. VTM et Het Laatste Nieuws ont ainsi été poursuivis dans le cadre de l’affaire des propos racistes de Conner Rousseau au nom du secret de l’instruction, même raison invoquée aussi par la ministre de l’Intérieur et un policier qui souhaitait que ni son nom ni son image ne soient cités dans le cadre du Qatargate, demandant ainsi la suppression d’une série d’articles de Sudpresse, mais aussi de ne plus jamais être le sujet d’un article à l’avenir.
Dans le premier cas, la cour d’appel de Gand a donné raison aux deux médias, après deux décisions rendues par les tribunaux de première instance, en rappelant que la censure préventive n’est pas autorisée. Concernant l’affaire du Qatargate, la juge a encore été plus claire comme l’explique Martine Simonis : "On n’a pas toujours des décisions qui vont dans le mauvais sens. La juge dit 'Je rappelle que visiblement vos demandes sont contraires à la Constitution et je les considère même comme téméraires'. Autrement dit : cette action n’aurait jamais dû être menée, et certainement pas devant mon tribunal". L’avocat spécialisé dans le droit des médias s’insurge d’autant plus que dans cette affaire, la demande émane de l’Etat fédéral : "Vous demandez qu’on interdise à l’avenir à un média de parler de tel sujet de façon absolue. Et c’est évidemment dramatique qu’une telle demande soit portée par un ministre fédéral qui doit connaître la Constitution".
L'article 25 de la Constitution oublié (ou outrepassé) par les juges
Dans le cadre de la plainte de Maxime Degey, c’est la protection de la vie privée qui est invoquée.
Toutes ces raisons sont pourtant caduques car la liberté de la presse prime. Mais visiblement, les tribunaux semblent oublier cet article de la Constitution.
"Soit c’est de l’incompétence du juge qui ne connaît pas le droit, soit c’est vraiment une volonté de violer la Constitution" synthétise Jacques Englebert.
"Soit c’est de l’incompétence du juge qui ne connaît pas le droit, soit c’est vraiment une volonté de violer la Constitution" synthétise Jacques Englebert.
En plus de l’article 25, la Constitution belge prévoit aussi pour la presse dans l’article 19 que "la liberté de manifester ses opinions en toutes matières est garantie, sauf la répression des délits".
"Et donc le droit belge est ainsi fait que la presse peut s’exprimer, et si on n’est pas content, on peut s’attaquer à elle après qu’elle se soit exprimée, pas avant."
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