L’Algérie et les convois inhumains.
Par la Rédaction du 25 avril 2025

Desert Sun ii
© Talts Jaanika
L’ALGÉRIE EXPULSE PLUS DE 1 200 MIGRANTS DANS LE DÉSERT NIGÉRIEN
Samedi 19 et mardi 22 avril, 1 217 migrants subsahariens ont été refoulés d’Algérie, en deux vagues, et abandonnés dans la zone du « Point Zéro », à quelques kilomètres de la frontière avec le Niger, en plein désert. Si la pratique est habituelle, ce mois d’avril marque un pic, a indiqué Alarme Phone Sahara (APS), une ONG active dans la région depuis plusieurs années.

Desert Sun ii
© Talts Jaanika
L’ALGÉRIE EXPULSE PLUS DE 1 200 MIGRANTS DANS LE DÉSERT NIGÉRIEN
Samedi 19 et mardi 22 avril, 1 217 migrants subsahariens ont été refoulés d’Algérie, en deux vagues, et abandonnés dans la zone du « Point Zéro », à quelques kilomètres de la frontière avec le Niger, en plein désert. Si la pratique est habituelle, ce mois d’avril marque un pic, a indiqué Alarme Phone Sahara (APS), une ONG active dans la région depuis plusieurs années.
« Autant de personnes en une fois, c’est beaucoup par rapport aux autres opérations de ce type », a précisé Azizou Chehou, coordinateur d’APS au Niger. Parmi les personnes refoulées, on compte 41 femmes et 12 enfants.
Les personnes expulsées sont originaires de dix-sept pays (d’Afrique de l’Ouest, du Soudan, d’Éthiopie et du Bangladesh). « Nous avons déjà recensé plus de 3 000 expulsions ce mois-ci, donc, actuellement, nous sommes à plus de 4 000 migrants refoulés depuis le début du mois d’avril », a souligné Azizou Chehou.
InfoMigrants, un site d’information spécialisé, rappelle que « les exilés sont généralement abandonnés, livrés à eux-mêmes en plein désert.
InfoMigrants, un site d’information spécialisé, rappelle que « les exilés sont généralement abandonnés, livrés à eux-mêmes en plein désert.
Sans eau ni nourriture, ils doivent parcourir à pied pendant des heures le chemin vers Assamaka où se trouve le centre de transit de l’Organisation internationale des migrations (OIM), le bras de l’ONU qui assiste les retours volontaires des migrants vers leur pays d’origine. »
Sur la route, certains se perdent ou meurent, le risque étant particulièrement élevé en cette saison caniculaire, où les températures dépassent 40 °C. « Rien qu’hier [mardi 22 avril, NDLR], les associations locales nous ont fait part de la découverte de deux cadavres.
Et un autre a été retrouvé lundi », a dit Azizou Chehou.
Au moins 31 404 personnes ont été refoulées par les autorités algériennes dans le désert en 2024, un record qui « dépass[e] tous les chiffres documentés des années précédentes », y compris celui de 2023 (26 031) », selon Alarme Phone Sahara.
Au moins 31 404 personnes ont été refoulées par les autorités algériennes dans le désert en 2024, un record qui « dépass[e] tous les chiffres documentés des années précédentes », y compris celui de 2023 (26 031) », selon Alarme Phone Sahara.
En janvier dernier, l’ONG avait vu dans cette évolution la conséquence du « renforcement de la coopération entre les pays du Maghreb, qui vise à rendre plus difficile l’arrivée et la poursuite du voyage des personnes venant du Niger et à y expulser des personnes à grande échelle ».
Dans un article publié alors sur son site, elle précisait que « les forces de sécurité algériennes effectu[ai]ent régulièrement des raids et des arrestations massives sur les lieux de vie et de travail des migrants », et elle observait, parallèlement, « une augmentation des expulsions en chaîne au cours desquelles des personnes [étaient] expulsées en Tunisie, souvent après des pullbacks en mer, vers la frontière algérienne, puis par les forces de sécurité algériennes vers la frontière nigérienne ».
Ces personnes s’entassent ensuite dans le nord du Niger sans possibilité d’intégration dans le pays, misant tout sur un retour volontaire ou une réinstallation dans un pays tiers.
Ces personnes s’entassent ensuite dans le nord du Niger sans possibilité d’intégration dans le pays, misant tout sur un retour volontaire ou une réinstallation dans un pays tiers.
Les capacités d’accueil des centres gérés par l’OIM à Agadez, Arlit et Assamaka sont limitées, et les places sont réservées à ceux qui acceptent un « retour volontaire » dans leur pays d’origine.
En abrogeant, en novembre 2023, la loi de 2015 criminalisant les circuits de migration clandestine, le Niger, pays de transit de la migration vers l’Europe devenu un centre de rétention, « a fait un pas considérable vers le rétablissement de la liberté de circulation sur les routes de l’exil et de la migration », écrivait APS en janvier.
En abrogeant, en novembre 2023, la loi de 2015 criminalisant les circuits de migration clandestine, le Niger, pays de transit de la migration vers l’Europe devenu un centre de rétention, « a fait un pas considérable vers le rétablissement de la liberté de circulation sur les routes de l’exil et de la migration », écrivait APS en janvier.
Mais en réponse, la Tunisie, l’Algérie et la Libye, encouragées « par la politique des États de l’UE, pratiquent à une échelle accrue les arrestations, refoulements et expulsions massives » à travers une nouvelle alliance maghrébine créée en avril 2024, affirme APS.
La radio-télévision nigérienne (RTN) a diffusé mercredi un reportage montrant des images des personnes refoulées, dont plusieurs visiblement blessées.
La radio-télévision nigérienne (RTN) a diffusé mercredi un reportage montrant des images des personnes refoulées, dont plusieurs visiblement blessées.
Les hommes interviewés y témoignent avec indignation des violences et vols subis de la part des forces de sécurité algériennes.
« On m’a tapé.
Quand tu es nigérien ou burkinabé, on te maltraite. » « Ils ont coupé nos cheveux, les gens ont couché avec nous, dans le désert là-bas, les policiers même.
Il ne faut pas venir en Algérie ! » « Nous, les Maliens, les Burkinabè et les Nigériens, ils nous fatiguent tellement ! » « J’avais une carte consulaire ; ils ont dit que ça ne fonctionne pas alors que c’est dans leur pays que j’ai pris ça. Ils nous ont tous frappés avec des matraques. » « Ils nous ont tout arraché : Argent, téléphone. Je n’ai rien pu emporter. »
Le commentaire de la télévision publique fustige l’Algérie « brouillée avec tous ses voisins [et] qui ne s’embarrasse guère du respect des lois nationales et autres conventions africaines et internationales ».
Le fait que le média d’État soit proche des autorités suggère que le retentissement donné à cette énième expulsion est politique.
Dans le contexte de tension diplomatique entre Alger et Bamako, Niamey veut afficher sa solidarité avec le Mali, dans le cadre de l’Alliance des États du Sahel (AES), même si sa relation avec l’Algérie est habituellement moins mauvaise.
Le commentaire de la télévision publique fustige l’Algérie « brouillée avec tous ses voisins [et] qui ne s’embarrasse guère du respect des lois nationales et autres conventions africaines et internationales ».
Le fait que le média d’État soit proche des autorités suggère que le retentissement donné à cette énième expulsion est politique.
Dans le contexte de tension diplomatique entre Alger et Bamako, Niamey veut afficher sa solidarité avec le Mali, dans le cadre de l’Alliance des États du Sahel (AES), même si sa relation avec l’Algérie est habituellement moins mauvaise.
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