DU VRAI CHANGEMENT : REBÂTIR LA RELATION ENTRE LE CANADA ET LES PEUPLES AUTOCHTONES

DU VRAI CHANGEMENT : REBÂTIR LA RELATION ENTRE LE CANADA ET LES PEUPLES AUTOCHTONES

Discours du chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, à la 36e assemblée générale annuelle de l’Assemblée des Premières Nations. Le mardi 7 juillet 2015.
La version prononcée fait foi
Bonjour,
Nous sommes réunis aujourd’hui sur le territoire traditionnel du peuple Haudenosaunee. C’est un honneur pour moi d’être ici avec vous.
Je tiens aussi à souligner les difficultés de nos amis dans l’Ouest et dans le Nord, où des feux de forêt ont touché des centaines de communautés et perturbé des milliers de vies. Au cours de ces derniers jours, j’ai parlé aux dirigeants des Premières Nations des communautés touchées par ces incendies, et cela m’a rappelé que, même si nous prenons effectivement des mesures pour réagir dans des circonstances difficiles, à l’échelle du pays, nous devons veiller à être mieux préparés à relever des défis comme les feux de forêt, pour parer à toute éventualité.
Je tiens à remercier les aînés, les anciens combattants, les jeunes, le Chef national de l’APN Perry Bellegarde, les membres du Comité exécutif de l’APN et l’assemblée des Chefs de me donner l’occasion de participer à cette assemblée générale annuelle. Je suis impatient de me joindre à vous de nouveau l’année prochaine, quoi que l’avenir me réserve.
En tant que chef libéral, j’ai eu la chance de rencontrer et de faire la connaissance d’un bon nombre d’entre vous ici réunis et je sais que vous connaissez vous aussi de nombreux membres de mon équipe.
Carolyn Bennett, notre porte-parole pour les Affaires autochtones… Les talentueux membres de l’équipe de la Commission libérale des peuples autochtones.
Bien entendu, vous connaissez Jody Wilson-Raybould, qui était jusqu’à tout récemment votre collègue en tant que chef régionale de l’Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique et qui est à présent la candidate libérale de Vancouver Granville.
Contrairement à M. Harper, nous sommes convaincus que les réformes en éducation doivent être menées par les Premières Nations. Nous n’imposerons donc jamais de solutions venant d’en haut.JUSTIN TRUDEAU
Jody fait partie de la douzaine de candidates et candidats libéraux autochtones, un groupe de dirigeantes et dirigeants expérimentés que nous sommes privilégiés de compter parmi notre équipe.
Je suis honoré par votre invitation et très heureux de cette occasion d’être à vos côtés lors de ces heures importantes, alors que notre pays s’engage sur la voie de la réconciliation, une tâche importante qui nécessite un travail continuel, de longue haleine.
Le mois dernier, la Commission vérité et réconciliation a publié son rapport sommaire et ses conclusions. Certains d’entre nous ici présents étaient également rassemblés à Rideau Hall, lors de la cérémonie qui a marqué la fin des travaux ardus de la Commission, qui se sont poursuivis pendant sept ans, pour aider notre pays à jeter la lumière sur cette période sombre de notre histoire.
C’est un événement que je n’oublierai jamais. Cette expérience m’accompagnera toujours – non pas seulement intérieurement, mais aussi à travers les mesures que je prendrai pour avancer, ensemble, avec vous.
Ce jour-là, les histoires racontées m’ont profondément touché, tout comme ce fut le cas d’autres Canadiennes et Canadiens.
Ce sont des histoires que je raconterai à mes propres enfants le moment venu, parce qu’il est important qu’ils sachent que les valeurs en lesquelles nous croyons en tant que Canadiennes et Canadiens – notre générosité, le respect et l’équité avec lesquels nous traitons les autres –, n’ont pas toujours été respectés.
Je leur parlerai des survivants que j’ai rencontrés ce jour-là. Et aux survivants présents ici aujourd’hui : sachez que vos histoires seront perpétuées. Je leur dirai pourquoi deux chaises sont restées vides.
N’importe quel parent ou enseignant vous le dira: le sens de la justice sociale est souvent plus aigu chez les jeunes. Je sais que mes enfants – tout comme les vôtres – voudront savoir comment nous ferons face à l’avenir ensemble. Comment nous trouverons le chemin de la réconciliation, maintenant que la vérité commence à être connue.
C’est une conversation tout particulièrement importante à avoir puisque nous nous préparons à commémorer le 150e anniversaire de la Confédération. Nous devons reconnaître que notre pays a été forgé sans la participation si importante des peuples autochtones.
Si le gouvernement fédéral établit des priorités et élabore des solutions sans l’avis des communautés autochtones, ces solutions ne donneront rien.JUSTIN TRUDEAU
Ce que ce pays a enduré pendant un siècle et demi mérite d’être célébré. Toutefois, j’estime aussi que cette commémoration sert à nous rappeler qu’il reste encore beaucoup à faire. Cent cinquante ans plus tard, la Confédération au vrai sens du terme reste encore à édifier.
Cela m’amène aux deux thèmes clés dont je souhaite vous parler aujourd’hui – deux défis interdépendants que nous devons relever si nous voulons faire avancer le travail essentiel visant à bâtir la nation, et à la rebâtir.
Premièrement, nous avons un besoin urgent de rebâtir la relation entre le gouvernement fédéral et les peuples autochtones du Canada. Il faut le rebâtir sur la confiance, la reconnaissance et le respect des droits, ainsi que sur un engagement de mettre fin au statu quo. Deuxièmement, je veux parler de l’importance de l’équité et de l’égalité des chances pour les peuples autochtones du Canada.
Au sujet des relations, comme je l’ai mentionné, nous parlons d’un siècle et demi de relations officielles et, avec du recul, de centaines d’autres années avant cela. Une relation symbolisée par des traités et, dans cette région du pays, par le wampum à deux rangs.
Il serait injuste – et inexact du point de vue historique – de rejeter la responsabilité de l’échec des relations entre la Couronne et les peuples autochtones sur l’un ou l’autre des gouvernements. Des générations de dirigeantes et de dirigeants politiques de tous les paliers se partagent la responsabilité de cet échec.
Cependant, je pense qu’il est juste de demander si l’approche du gouvernement actuel permettra vraiment de restaurer les relations détériorées, de rétablir la confiance brisée et d’appuyer les communautés des Premières Nations pour qu’elles développent tout leur potentiel.
Je sais que c’est une tâche qui tenait à cœur à mes récents prédécesseurs libéraux. Il y a un peu plus d’une décennie, l’ancien gouvernement libéral mené par le premier ministre Paul Martin a lancé un processus conjoint entre le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les gouvernements autochtones. L’objectif consistait à établir des priorités et trouver des solutions pour relever les défis des communautés autochtones.
Le résultat de ce dialogue s’appelle l’Accord de Kelowna.
Le pivot de l’Accord de Kelowna était le plan de collaboration de nation à nation qui cherchait à combler l’écart inacceptable en termes d’inégalités présentes dans de trop nombreuses communautés autochtones. Il cherchait à faire en sorte que les personnes que vous représentez aient accès à des droits essentiels, comme un logement sûr et l’eau potable. Ce plan devait améliorer les niveaux d’éducation, reconnaître vos droits à la gouvernance en tant que partenaires à part entière dans la fédération et favoriser une croissance économique durable dans vos communautés.
Cependant, suite à l’entente entre les partis d’opposition pour défaire le gouvernement de M. Martin, Harper a pris le pouvoir et l’Accord de Kelowna, ainsi que tout ce qu’il représentait, ont été balayés.
Au cours de la dernière décennie, toute tentative sérieuse de bâtir des relations a laissé place à un simulacre politique et à l’illusion du progrès.
Harper a entre autres légué des lois imposées par le gouvernement qui font preuve d’un manque choquant de compréhension des éléments nécessaires pour aller au-delà de la Loi sur les Indiens et l’approche de la gouvernance paternaliste qui est devenue la marque de fabrique d’Ottawa.
Des documents aux noms inoffensifs comme la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations, la Loi sur les biens familiaux ou la Loi sur la transparence financière des Premières Nations, peuvent sembler de bonnes initiatives. Cependant, en y regardant de plus près, il est évident qu’ils sont simplement les tout derniers exemples de l’ingérence fédérale – du gouvernement qui dicte ses propres conditions au lieu de collaborer pour soutenir la gouvernance des Premières Nations.
Nous réparerons les dégâts de dix longues années perdues.JUSTIN TRUDEAU
L’héritage de M. Harper aurait pu être différent. Il aurait pu choisir de combler l’écart inexcusable en matière de financement. Il aurait pu choisir de combler l’écart dans les résultats d’apprentissage des élèves des Premières Nations. Mais quand l’assemblée des Chefs a refusé d’accepter un projet de loi sur l’éducation fondamentalement vicié, le gouvernement de M. Harper a utilisé cette excuse pour abandonner purement et simplement le processus. Et il en a profité, une fois de plus, pour réaffecter les fonds ailleurs, comme cela a si souvent été le cas avec son gouvernement.
M. Harper a aussi créé de faux espoirs en matière de résolution des revendications territoriales et de mise en application des droits issus de traités.
Il a rejeté les demandes de tenir une enquête publique au sujet des disparitions et des assassinats de femmes et de filles autochtones.
Plus récemment, il est resté complètement muet au sujet des recommandations faites par la Commission vérité et réconciliation.
Voilà l’héritage de M. Harper.
La bonne nouvelle est qu’au mois d’octobre, les électeurs pourront choisir un gouvernement différent. Un meilleur gouvernement.
Un gouvernement qui comprend que les droits des peuples autochtones du Canada garantis par la Constitution ne sont pas un fardeau, mais plutôt une obligation sacrée qui est au coeur de ce qu’est le Canada en tant que pays. Un gouvernement qui comprend que nos avenirs sont étroitement liés. Un gouvernement qui comprend que la Couronne doit toujours agir honorablement et en toute bonne foi lorsqu’elle traite avec les peuples autochtones.
Lorsque je dis que nous devons terminer de bâtir la Confédération, je veux dire que le Canada a besoin de renouveler ses relations de nation à nation avec les communautés autochtones.
Une relation fondée sur la reconnaissance, les droits, le respect, la coopération et le partenariat. Une relation ancrée dans les principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Une relation guidée par l’esprit et l’intention des traités établis à l’origine et qui respecte les décisions de nos tribunaux. Une relation qui va au-delà de nos ententes officielles et montre comment nous devons nous traiter les uns les autres – de personne à personne et d’esprit à esprit. Une relation qui n’oublie pas qu’en nous conduisant avec dignité, nous montrons notre respect pour le Créateur et pour la création.
Nous ne devons pas renouveler nos relations seulement parce que c’est ce qu’il convient de faire – bien que ce soit assurément le cas. Renouveler nos relations nous guidera aussi sur la voie de la croissance économique responsable dont nous avons tous besoin et de la prospérité commune que nous méritons tous.
Les mots ne seront jamais suffisants tant et aussi longtemps que le gouvernement n’aura pas la volonté politique d’être un partenaire véritable et honnête.JUSTIN TRUDEAU
Notre programme électoral décrira plus en détails nos engagements, mais je peux cependant vous présenter trois des moyens par lesquels nous espérons commencer ce renouvellement.
Tout d’abord, l’une de nos priorités nationales sera la mise au point d’un accord cadre de réconciliation fédérale, créé en collaboration étroite avec les peuples autochtones.
La réconciliation commence par la reconnaissance et le respect des titres et des droits autochtones, et notamment des droits issus de traités. Un gouvernement libéral ne s’arrêtera cependant pas là. Non pas en vertu de ses obligations constitutionnelles, mais bien en vertu de celles inscrites dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Un point que le gouvernement actuel a toujours refusé.
À cette fin, nous procéderons à un examen complet de la législation imposée unilatéralement aux peuples autochtones par le gouvernement Harper, en la passant au crible de l’article 35 de la Constitution. Si certaines mesures sont jugées être en conflit avec les droits des Autochtones, si elles ne respectent pas les principes de bonne gouvernance ou si elles n’ont tout simplement aucun sens en matière de politique publique, nous les annulerons.
Le projet de loi C-51 en est l’exemple parfait. Je sais que ce texte législatif préoccupe de nombreux autochtones – tout comme il préoccupe les libéraux.
Les libéraux ont toujours compris qu’il fallait trouver un équilibre entre notre sécurité et la protection de nos droits et libertés. Si nous soutenons les mesures de sécurité que renferme ce projet de loi, nous sommes néanmoins déterminés à modifier et à abroger les articles qui sont autant de sources de préoccupations.
En d’autres termes, les peuples autochtones qui revendiquent leurs droits ne sont pas des terroristes et ne devraient jamais être qualifiés comme tels.
Cet accord cadre de réconciliation inclura aussi des mécanismes de résolution des griefs liés aux traités historiques existants et aux ententes sur les revendications territoriales récentes. Le processus actuel ne fonctionne tout simplement pas. Nous collaborerons avec les Premières Nations pour redéfinir la manière dont le Canada prend part aux négociations des traités modernes et en applique pleinement les dispositions.
Dans certains cas, le travail de réconciliation a déjà commencé, mais les efforts sont entravés par des mandats fédéraux étriqués et par le manque de mesures concrètes. Nous collaborerons avec les Premières Nations pour aboutir à des résolutions justes et équitables. Cela passera par le règlement des problèmes de gouvernance. L’accord cadre de réconciliation inclura des mécanismes qui feront progresser l’autonomie gouvernementale et la renforceront.
J’estime qu’un partenariat respectueux et coopératif est non seulement possible, mais qu’il s’agit d’un devoir sacré hérité des générations passées et que nous confient les générations à venir.JUSTIN TRUDEAU
Je comprends les difficultés que ce travail peut présenter. Peu importe le bien-fondé de nos intentions, les injustices qui ont perduré pendant des siècles ne s’effaceront pas immédiatement. Cependant, je comprends aussi combien il est important pour les Premières Nations d’être des partenaires à part entière à ces assemblées où des décisions communes sont prises sur l’avenir de notre pays, que ce soit en matière d’exploitation des ressources ou d’intendance environnementale.
En deuxième lieu, dans le cadre du renouvellement des relations entre le gouvernement fédéral et les Premières Nations, nous intensifierons nos efforts pour faire en sorte que les voix de vos Nations soient entendues à Ottawa.
Comme vous le savez, les modifications apportées à la Loi électorale compliquent l’exercice du droit de vote pour les peuples autochtones. Nous abrogerons ces modifications.
Et surtout, nous tenons à avoir votre avis direct. Si je deviens premier ministre après l’élection à venir, je rencontrerai les dirigeantes et dirigeants des Premières Nations à chaque année. De plus, au sein de notre parti, les députés libéraux seront toujours d’ardents défenseurs de leurs communautés. Le besoin qu’a Ottawa de connaître votre avis dépasse de loin le besoin que vous avez d’écouter Ottawa.
Et en troisième lieu, pour appuyer le travail de réconciliation et poursuivre le processus nécessaire de recherche de la vérité et de guérison, nous collaborerons avec vous pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission vérité et réconciliation, à commencer par l’application des dispositions de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies.
Le deuxième thème dont je souhaite vous entretenir aujourd’hui est le besoin urgent d’améliorer l’équité et l’égalité des chances dans les communautés autochtones. Sans cela, tous les engagements dont j’ai parlé pour restaurer et renouveler les relations demeureront stériles.
Redonner à l’équité tout son sens est au cœur du plan libéral pour notre pays.
Malheureusement, beaucoup trop de Premières Nations, Métis et Inuits ont été systématiquement écartés et se sont vus refuser les biens de première nécessité que la plupart des Canadiennes et Canadiens prennent pour acquis et qui sont les piliers de l’équité et des possibilités d’avenir.
Je suis convaincu qu’il est possible de combler l’écart qui existe dans la qualité de vie entre les autochtones et les non autochtones.JUSTIN TRUDEAU
Comme a eu raison de le souligner le Chef national Bellegarde, l’écart actuel entre les Canadiennes et Canadiens et les peuples autochtones est grand – et il est inquiétant. Selon un indice des Nations Unies qui évalue les conditions de vie, le Canada se classe au huitième rang mondial, mais si l’on applique ces mêmes indicateurs aux communautés autochtones, elles ne se classent qu’en 63e position.
Pour combler cet écart, l’histoire nous montre qu’une approche imposée d’en haut ne mène nulle part. Nous avons besoin d’une approche basée sur la collaboration, similaire à celle dont le résultat fut l’Accord de Kelowna. Un processus qui tient compte des expériences des peuples autochtones et leur donne vraiment voix au chapitre dans l’établissement des priorités et l’élaboration des solutions qui permettront à leurs communautés de relever leurs défis quotidiens.
Cette dernière partie mérite d’être répétée : Si le gouvernement fédéral établit des priorités et élabore des solutions sans l’avis des communautés autochtones, ces solutions ne donneront rien.
Un gouvernement libéral procédera autrement et voici comment :
Nous reprendrons immédiatement le processus de nation à nation renouvelé, respectueux et inclusif dont j’ai parlé. Notre priorité commune sera de faire avancer les enjeux que vous avez jugés prioritaires – des enjeux comme le logement, l’infrastructure, les soins de santé et de santé mentale, la sécurité et la police communautaires, l’aide à l’enfance et l’éducation.
En outre, nous veillerons à ce que l’Accord de Kelowna – tout comme l’esprit de réconciliation qui l’anime – soient respectés et que ses objectifs soient mis en œuvre d’une manière qui permette de relever les défis du moment. Nous réparerons les dégâts de dix longues années perdues.
À cet égard, nous éliminerons immédiatement le plafonnement à deux pour cent du financement visant les programmes des Premières Nations. Ce seuil – mis en place depuis près de 20 ans – n’a pas évolué en fonction des réalités démographiques de vos communautés ou du coût réel de la prestation des programmes.
C’est simple : aucun de nos objectifs communs ne peut être atteint si le statu quo perdure. Nous avons besoin de bâtir de nouvelles relations financières qui assurent à vos communautés un financement suffisant, prévisible et durable. Augmenter les recettes autonomes des Premières Nations, que ce soit par le partage des recettes ou d’autres mécanismes, est une priorité. Ensemble, nous pouvons bâtir ces nouvelles relations financières pour le bien des peuples autochtones et de toutes les Canadiennes et de tous les Canadiens.
En termes de décisions quant aux postes d’investissement, nous demanderons les conseils avisés des Premières Nations pour nous orienter. Trois priorités de financement spécifiques viennent cependant à l’esprit.
La première est l’éducation. C’est un domaine où nous savons que le financement ne peut attendre. Nous consentirons de nouveaux investissements considérables à l’éducation des Premières Nations – bien au-delà de ceux promis et non octroyés par M. Harper l’année dernière. Nous consentirons ces investissements immédiatement, pour aider à combler l’écart chronique.
L’avenir des enfants des Premières Nations n’est pas seulement votre avenir, mais celui du Canada. Les communautés, éducateurs et élèves des Premières Nations ne devraient pas avoir à attendre un seul jour de plus pour obtenir les ressources essentielles dont ils ont besoin.
En même temps, nous veillerons à ce que les Premières Nations aient le contrôle de l’éducation de leurs peuples. L’éducation et les réformes de l’éducation sont une priorité de votre assemblée, tout comme nous. Cependant, contrairement à M. Harper, nous sommes convaincus que les réformes en éducation doivent être menées par les Premières Nations. Nous n’imposerons donc jamais de solutions venant d’en haut.
Je suis impatient de me joindre à vous de nouveau l’année prochaine, quoi que l’avenir me réserve.JUSTIN TRUDEAU
La deuxième priorité vise à nous assurer que toutes les Premières Nations sont dotées d’un financement équitable pour les services à l’enfance et à la famille dans les réserves.
Il est inadmissible que votre Assemblée et la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations aient dû déposer un recours devant la Commission canadienne des droits de la personne pour veiller à l’égalité des services et à la justice. Il est honteux que le travail si important de défense des droits de la personne entrepris par Cindy Blackstock soit accueilli avec méfiance et fasse l’objet de représailles au lieu d’être apprécié et encensé.
Et, en dernier lieu, un nouveau financement important viendra également appuyer votre capacité à promouvoir, préserver et améliorer les langues et les cultures autochtones. C’est pour moi essentiel. Une langue est l’expression des modes de pensée et des connaissances culturelles. Maîtriser une langue est directement lié à une meilleure santé physique, mentale et spirituelle. Nous savons par expérience le rôle vital que la revitalisation des langues joue dans l’édification de communautés fortes, ainsi qu’aux niveaux de la guérison, de l’éducation, du développement, de la solidité des familles, tout comme dans le fait de renouer avec son identité. En bref, une langue en bonne santé est le gage de personnes et de communautés en bonne santé.
Je tiens à souligner de nouveau que ces moyens ne sont que quelques-unes des pistes par lesquelles nous pouvons bâtir une relation plus respectueuse et plus productive entre Ottawa et les Premières Nations. Ce sont aussi certains des résultats que nous comptons obtenir par le biais de ce travail collectif acharné.
Avant de conclure, je tiens à aborder un autre sujet qui est celui de l’importance d’une enquête nationale sur la disparition et l’assassinat de femmes et de filles autochtones.
De l’avis unanime des familles des victimes, des dirigeantes et dirigeants autochtones, de toutes les premières ministres et de tous les premiers ministres, des organisations non gouvernementales, de la communauté internationale et de la Commission vérité et réconciliation, une enquête publique nationale est nécessaire. Seuls Harper et son gouvernement conservateur ne sont pas d’accord.
En réalité, à quoi d’autre pourrions-nous nous attendre d’un dirigeant qui refuse d’admettre que la disparition et la mort de près de 1 200 femmes et filles autochtones est une tragédie nationale qui doit cesser?
À l’inverse, un gouvernement libéral lancera immédiatement une enquête. Le processus par lequel elle sera menée sera entièrement inclusif, conçu pour rendre justice aux victimes et soulager leurs familles.
L’enquête visera à recommander des mesures concrètes afin que les gouvernements, la police et les autres intervenantes et intervenants puissent résoudre ces crimes et en éviter de nouveaux. Il ne s’agit pas d’ignorer la vérité, même si elle est désagréable, mais de comprendre et de prendre des mesures pour traiter les causes profondes de cette tragédie nationale.
Il y a sept ans, M. Harper a déclaré que le moment était venu de « (forger) une nouvelle relation entre les peuples autochtones et les autres Canadiens, une relation fondée sur la connaissance de notre histoire commune, le respect mutuel et la volonté d’avancer ensemble.
Ce sont des mots forts; toutefois, le juge Sinclair nous a rappelé que les mots n’étaient pas suffisants.
Les mots ne seront jamais suffisants tant et aussi longtemps que le gouvernement n’aura pas la volonté politique d’être un partenaire véritable et honnête. Même un mot comme « équité » – qui revêt une telle importance dans notre identité canadienne – n’a aucun poids si elle n’est pas suivie de mesures concrètes et quantifiables.
Pour terminer, permettez-moi de dire ceci : Le parti libéral a un plan pour apporter du vrai changement, et je dispose d’une équipe talentueuse pour faire en sorte qu’il aboutisse.
Je m’engage à ce qu’un gouvernement libéral collabore avec vous pour rebâtir notre relation en nous fondant sur la confiance, le respect et la compréhension mutuelle, dans l’esprit et l’intention des traités établis à l’origine.
Pour revenir à cette journée à Rideau Hall pendant les cérémonies de clôture des travaux de la Commission vérité et réconciliation, j’ai été saisi d’un profond espoir – un espoir que malgré des années de temps perdu et d’occasions manquées, Harper profiterait du moment pour tracer une nouvelle voie, faire progresser une réconciliation véritable et combler l’écart inacceptable dans la qualité de vie, en partenariat avec vos dirigeantes et dirigeants et vos communautés.
Aujourd’hui, il est évident que mon espoir a été déçu.
Cependant, je n’ai pas perdu de vue cet objectif et ce ne sera jamais le cas.
Je suis convaincu qu’il est possible de combler l’écart qui existe dans la qualité de vie entre les autochtones et les non autochtones.
Je crois que si nous voulons un Canada dont nous pouvons tous être résolument fiers, cet écart doit être comblé.
J’estime qu’un partenariat respectueux et coopératif est non seulement possible, mais qu’il s’agit d’un devoir sacré hérité des générations passées et que nous confient les générations à venir.
Enfin, je considère que la réconciliation n’est pas un enjeu autochtone, mais bien un enjeu canadien et que le moment est venu de bâtir un avenir meilleur pour toutes nos communautés et tous nos enfants.
J’ai hâte d’amorcer ce travail en partenariat avec vous. Merci.

Commentaires