Pourquoi Israël intervient en Syrie depuis la chute d’Assad ?


Pourquoi Israël intervient en Syrie depuis la chute d’Assad ?


Assad (2010) / Netanyahu (2024) © Brunopress / AFP

Israël n’était pas favorable à la chute d’Assad, mais doit désormais y faire face. Depuis dimanche dernier, l’armée israélienne a rapidement engagé des actions militaires en Syrie. 
Pourquoi ? 
Quels objectifs sont visés ? 
Et quels résultats ?


 Le 11 12 2024

Aboe Mohammad al-Golani, leader de HTS © Screenshot video CNN

Pourquoi Israël passe à l’action ?


Israël a conquis le plateau du Golan (la zone frontalière avec la Syrie) lors de la guerre des Six Jours en 1967. Sept ans plus tard, lors de la guerre du Kippour en 1973, Damas n’a pas réussi à reconquérir la zone. En 1974, la résolution 350 du Conseil de sécurité a instauré une zone démilitarisée sous contrôle de l’ONU.
Lorsque la guerre civile syrienne a éclaté en 2011, Israël est d’abord resté assez passif, mais cela a changé petit à petit, au fur et à mesure que l’Iran intervenait sur le terrain. Vers 2014, Israël a commencé en Syrie ce qu’on a appelé “la guerre entre les guerres”, c'est-à-dire perturber l’approvisionnement en armes et autres matériels illégaux destinés à son ennemi du Hezbollah au Liban.

Pour Israël, il y a aujourd’hui beaucoup d’inconnues. Alors qu’il était très bien informé sur Assad et son régime, c’est beaucoup moins le cas concernant le groupe rebelle Hayat Tahrir al-Sham (HTS). Deux choses inquiètent Israël: la protection de sa frontière avec la Syrie et les stocks d’armes qui y sont accessibles.

Depuis le raid effectué par le Hamas le 7 octobre de l’année dernière, Israël est devenu beaucoup plus agressif en matière de protection de ses frontières et cela se vérifie encore aujourd'hui. En ce qui concerne le second point d’inquiétude, le ministre des Affaires étrangères Gideon Saar a affirmé que l’armée passerait à l’action: “des armes stratégiques, les capacités restantes d’armes chimiques, les missiles de longue portée et les roquettes seront ciblés, afin qu’elles ne tombent pas entre les mains de radicaux”.

Une seconde inquiétude partagée par les États-Unis

Les États-Unis partagent cette inquiétude, surtout en ce qui concerne les armes chimiques. Un fonctionnaire du gouvernement américain a déclaré au Wall Street Journal que Washington possédait “de bons renseignements” sur l’inventaire des armes chimiques en Syrie.

“Nous faisons tout notre possible pour nous assurer que les armes chimiques ne tombent pas en de mauvaises mains et qu’elles soient bien sécurisées. Nous voulons nous assurer que le chlore ou des substances bien plus dangereuses soient détruites ou sécurisées.”

2013 © afp

Quels objectifs sont visés ?

Une double crainte, qui se transforme donc en double objectif militaire. Pour sécuriser sa frontière, Israël est intervenu depuis dimanche dans le sud de la Syrie. 
La cause serait une attaque d’hommes armés inconnus contre un poste de l’ONU dans la zone démilitarisée de Hader.

La résolution de l’ONU de 1974 n’est donc plus d’application, a déclaré le Premier ministre israélien Netanyahu. “L’armée syrienne a quitté la région. Nous avons ordonné à nos troupes de prendre ces positions afin d’éviter qu’une force ennemie ne s’installe juste à côté de la frontière d’Israël.”

Ce qui se passe précisément pour neutraliser les stocks d’armes, est plus difficile à déterminer. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), Israël a effectué plus de 300 frappes aériennes en Syrie depuis dimanche. L’OSDH se base sur des informations transmises par un large réseau d’informateurs.

Des véhicules de l'armée israélienne reviennent de la zone tampon. © AFP

Avec quel résultat ?

Mardi matin, l’armée israélienne avait déjà progressé de plusieurs kilomètres en Syrie. Une source de sécurité syrienne a déclaré à l’agence de presse Reuters que les troupes israéliennes avaient atteint Qatana, (ce qui a été démenti par Israël), à l’est de la zone démilitarisée qui sépare les hauteurs du Golan, occupées par Israël, de la Syrie. La ville se trouve à environ 25 kilomètres au sud-ouest de la capitale Damas.
Jusqu’où vont-ils encore progresser? Et combien de temps resteront-ils sur place? La première question relève plutôt de la spéculation, tandis que la seconde est plus claire. Le Premier ministre Netanyahu affirme que la situation est temporaire, “jusqu’à ce qu’un accord approprié soit trouvé”. L’historie a prouvé à de nombreuses reprises que cela peut prendre beaucoup de temps. Il a également ajouté que le Golan “restera pour toujours” israélien.

“Une limite dans le temps”

Les États-Unis soulignent que toute action israélienne en Syrie doit avoir une limite dans le temps. “Ce que nous voulons, c’est que la résolution de 1974 soit pleinement respecté. Nous veillerons à ce qu’Israël le fasse également”, a déclaré Matthew Miller, porte-parole du département d’État. Cependant, ce sera bientôt au tour de Donald Trump, qui, lors de son premier mandat, a reconnu l’annexion du Golan par Israël en 1981. 
Un geste pour lequel Netanyahu l’a remercié à nouveau dimanche.

Concernant les stocks d’armes, des journalistes de l’AFP ont rapporté mardi matin de nouvelles attaques contre des sites à Damas. Lundi, au moins trois bases aériennes ont été attaquées, dont celle de Mazzeh près de Damas, où des dizaines d’hélicoptères et de chasseurs étaient stationnés. 
À Barzeh, une banlieue nord de Damas, le ‘Syrian Scientific Studies and Research Centre’ a été bombardé. Ce centre a été associé par le passé à la production d’armes chimiques.

Le port de Lattaquié a également été la cible d’une frappe aérienne. Des navires de la marine et des batteries de défense aérienne y ont été touchés. 

L’Observatoire syrien des droits de l’homme mentionne également des attaques contre des routes, des stations radar, ainsi que des dépôts d’armes et de munitions.

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