Le gouvernement israélien entre dans une phase plus dangereuse que jamais.


Le gouvernement israélien entre dans une phase plus dangereuse que jamais.


Publié le 11/06/2023



La refonte judiciaire est en général considérée comme la menace principale actuelle contre la démocratie. Il est pourtant primordial de mettre en évidence son lien direct avec la montée des attaques contre les Palestiniens.

Depuis son arrivée au pouvoir il y a cinq mois, le sixième gouvernement dirigé par le Premier ministre Benjamin Netanyahu a connu trois phases principales. 

Le premier fut la refonte judiciaire, qui a dominé la vie politique israélienne de janvier à avril. La résistance sans précédent du mouvement de protestation « pro-démocratie », qui a culminé avec des grèves qui ont complètement paralysé le pays, a forcé Netanyahu à faire une pause et à entamer des négociations avec l’opposition dont on ne saurait prédire le résultat.

La deuxième phase, durant avril et la majeure partie de mai, s’est concentrée sur l’adoption du budget biennal, lequel, en accordant aux colons et aux partis Haredi un financement considérablement accru, a pratiquement garanti la stabilité du gouvernement pour les deux prochaines années.

Au cours des deux dernières semaines, nous avons vu le début de la phase trois : l’accent mis désormais sur la poursuite accélérée de l’annexion, l’augmentation de la violence contre les Palestiniens et l’étouffement de toute résistance. Ce sont ces questions qui constituent la véritable raison d’être de ce gouvernement. Cette phase vit son prélude avec le pogrom des colons à Huwara, incité et soutenu par de hauts responsables gouvernementaux; la promesse faite au ministre kahaniste de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, de mettre sous son contrôle direct une nouvelle milice qui combattrait les Palestiniens et les gens de gauche; et une attaque contre Gaza responsable de la mort de dizaines de palestiniens dans la bande assiégée.

Mais ce sont les deux dernières semaines qui nous ont mis en garde quant à ce qui risque de se passer lorsque le gouvernement focalisera encore plus son attention sur les Palestiniens. Voici une liste (pourtant partielle) des développements récents.

Le ministre des Finances Betalel Smotrich, qui est également ministre chargé, au sein du ministère de la Défense, des questions civiles en Cisjordanie occupée, a annoncé son intention de doubler le nombre de colons dans les territoires occupés d’ici deux ans. L’armée a annulé un ordre interdisant aux colons d’entrer dans la zone entourant Homesh – une colonie israélienne établie sur des terres palestiniennes et évacuée en 2005, mais dans laquelle les colons sont progressivement revenus au fil des ans – et a tout fait pour faciliter sa reconstruction, illégale même eu égard de la loi israélienne.

Pendant ce temps, les attaques des colons contre les villages palestiniens se sont intensifiées et, pour ainsi dire, normalisées. Les assaillants, souvent protégés – ou du moins nullement entravés – par l’armée, incendient régulièrement maisons et véhicules, et tirent parfois des balles réelles. Rien qu’au cours des deux dernières semaines, de telles attaques ont été menées contre Burqa, Jalud et Ein Samia – cette dernière ayant conduit les résidents palestiniens à démolir leur propre village et à s’enfuir.

La semaine dernière, un projet de loi visant à interdire de faire flotter le drapeau palestinien a passé une lecture préliminaire à la Knesset. Mercredi, un autre projet de loi, qui propose de réintroduire le contrôle du Shin Bet sur les enseignants et directeurs d’école arabes, a également passé sa lecture préliminaire.

Dimanche, le Comité ministériel sur la législation, qui décide de la position de la coalition sur les divers projets de loi présentés à la Knesset, devra discuter et sans doute soutenir trois nouvelles propositions. La première consiste à imposer une taxe de 65 % sur les dons des États étrangers aux organisations à but non lucratif israéliennes, dons qui représentent une bouée de sauvetage pour de nombreux groupes israéliens de défense des droits de l’homme (+972 reçoit également un tel financement, ce qui représente environ 1 % de notre budget annuel). 

La seconde proposition vise à annexer à Israël des « sites du patrimoine » juifs de la Cisjordanie. La troisième stipule que les citoyens palestiniens qui fréquentent les universités et collèges israéliens seront bannis de toutes les institutions académiques s’ils lèvent un drapeau palestinien ou montrent leur soutien à la résistance armée palestinienne. 

Toutes les trois ont, pour l’instant, été laissées en suspens, suite à d’intenses pressions des États-Unis, de l’Union européenne et des universités israéliennes.

Et enfin, en une seule phrase, le ministre de la Justice Yariv Levin nous a rappelé à tous que ses plans, et ceux du député du Parti sioniste religieux Simcha Rothman pour la « réforme » judiciaire, n’ont pas grand-chose à voir (comme ils aiment pourtant le prétendre) avec la démocratie et l’égalité, et tout à voir avec la consécration de la suprématie juive et le contrôle incontesté de la droite. 

La semaine dernière, Levin aurait déclaré que « les arabes achètent des appartements dans les villes juives » et que nous avons besoin de « juges de la Cour suprême qui comprendront cela ». En effet, Levin signalait ainsi aux juges actuels et futurs qu’ils doivent être prêts à prendre les mesures nécessaires pour soutenir la ségrégation

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