Comment le monde a-t-il changé ces 20 dernières années ?
- Le 02 février 2022
NATIONS UNIES, New York – Il y a vingt ans, en 1994, la communauté internationale se réunissait au Caire, en Égypte, pour analyser l’évolution du monde et la manière dont les changements affectaient les personnes les plus vulnérables. La Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) a ainsi conclu que les activités en matière de population – y compris la planification familiale volontaire, la santé maternelle et infantile, les migrations et l’égalité des sexes – ne consistent pas simplement à compter les personnes mais à s’assurer que chaque individu compte.
Lors de la conférence de 1994, 179 gouvernements ont signé le Programme d’action de la CIPD, qui reconnaît que les femmes, leurs droits et l’égalité des sexes constituent des priorités du développement mondial. Les gouvernements se sont engagés à : assurer l’accès universel à la planification familiale volontaire et à la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation, promouvoir l’égalité des sexes et l’égalité d’accès à l’éducation, traiter des répercussions de l’urbanisation et des migrations et soutenir le développement durable.
Aujourd’hui, le monde a beaucoup changé, transformé par la révolution numérique et les progrès de la médecine et du savoir humain. Mais ces changements sont-ils ceux escomptés ?
L’UNFPA s’interroge ci-dessous sur les changements les plus importants et les mesures devant être prises.
1. Les jeunes n’ont jamais été aussi nombreux qu’à l’heure actuelle.
Les adolescents et les jeunes, âgés de 10 à 24 ans, représentaient 28 % de la population mondiale en 2010. Le monde doit investir pour satisfaire leurs besoins et promouvoir leurs droits, soutenir leur accès à des soins de santé et à une éducation de qualité, leur fournir des possibilités d’emploi rémunéré et les protéger des mauvais traitements comme les mariages et les grossesses précoces1.
2. La proportion de personnes vivant dans l’extrême pauvreté a diminué de moitié mais les inégalités économiques sont désormais en hausse.
La proportion de personnes vivant avec moins de 1,25 dollar par jour a reculé de 47 % en 1990 à 22 % en 2010. Mais les inégalités croissantes risquent de compromettre ces avancées.
Aujourd’hui, 8 % de la population mondiale détiennent 82 % des richesses mondiales, et plus d’un milliard de personnes continuent de vivre dans l’extrême pauvreté, sans accès à la protection sociale, à un emploi décent ou aux services publics de santé ou d’éducation. Les progrès accomplis ces 20 dernières années ne pourront pas être maintenus si nous ne résorbons pas les inégalités1, 2.
3. Ces 20 dernières années, la population mondiale a augmenté de 25 %, passant de 6,55 milliards à 7,24 milliards de personnes.
Les 7,2 milliards d’habitants de la planète – et les générations futures – méritent tous sans exception que leurs droits et leur dignité soient respectés et protégés. Cela suppose d’assurer l’égalité des sexes et l’accès universel aux droits en matière de sexualité et de procréation3.
4. La croissance démographique ralentit.
Il y a 20 ans, la croissance démographique était de 1,52 % par an. Aujourd’hui, elle est de 1,15 % par an. Au rythme actuel, on peut s’attendre à ce que la population mondiale atteigne 9,55 milliards de personnes d’ici 20501, 3. Plusieurs raisons expliquent le ralentissement de la croissance démographique :
5. Les femmes ont moins d’enfants.
En 1994, les femmes avaient en moyenne trois enfants ; aujourd’hui, le taux de fécondité est d’environ 2,5 enfants par femme. Un taux de fécondité faible est synonyme de meilleures conditions de vie pour les femmes, car les grossesses sont assorties de risques qui multiplient les risques de décès maternels.
Cependant, dans certains des endroits les plus pauvres du monde, la fécondité demeure élevée. Ainsi, 18 pays affichent un taux de fécondité de cinq enfants ou plus par femme1, 3.
6. Les grossesses chez les adolescentes ont chuté d’au moins 50 % dans de nombreux pays.
Le taux de fécondité des adolescentes recule. Mais, chaque jour, 20 000 filles âgées de moins de 18 ans deviennent mères dans les pays en développement et, chaque année, 70 000 adolescentes décèdent de complications liées à la grossesse et à l’accouchement3, 4.
7. L’utilisation de moyens contraceptifs a augmenté ces 20 dernières années – mais les besoins non satisfaits en la matière demeurent considérables.
La plupart des femmes déclarent vouloir de deux à quatre enfants. Les services de planification familiale et les méthodes de contraception modernes et sûres aident les femmes à atteindre cet objectif en évitant des grossesses non désirées.
Cependant, entre 2008 et 2012, la proportion de femmes mariées utilisant une méthode de contraception dans les pays en développement n’a pratiquement pas changé (passant de 56 à 57 %). De plus, environ 222 millions de femmes sont privées d’accès aux moyens de contraception modernes5, 6, 7.
8. Les décès maternels ont presque diminué de moitié.
Les décès liés à des complications pendant la grossesse ou l’accouchement ont chuté de 47 % depuis 1994. À l’époque, on comptait plus de 500 000 décès maternels par an.
Mais il reste encore beaucoup à faire. Chaque jour, 800 femmes décèdent de causes évitables, comme l’hémorragie post-partum, la septicémie, la dystocie d’obstacle, les complications liées à des avortements non médicalisés et l’hypertension1, 3.
9. Les décès d’enfants ont presque diminué de moitié.
Les décès d’enfants de moins de cinq ans ont reculé de 90 pour 1 000 naissances vivantes en 1994 à 48 pour 1 000 naissances vivantes en 2012. Un facteur majeur ayant contribué à ce déclin est l’amélioration de l’accès des femmes et des filles à l’éducation. En effet, les femmes et les filles instruites sont en mesure de prendre des décisions personnelles et familiales plus éclairées. L’éducation des filles est étroitement liée à la baisse du nombre de mariages d’enfants et de grossesses précoces et à un meilleur accès aux soins de santé maternelle et infantile, qui contribuent tous à l’amélioration de la survie des enfants1, 7, 8.
10. Le nombre d’accouchements réalisés avec l’assistance d’un personnel de santé qualifié – médecin, sage-femme ou infirmière – a augmenté.
Dans les pays en développement, la proportion d’accouchements réalisés avec l’assistance d’un personnel de santé qualifié est passée de 56 % en 1990 à 67 % en 2011. L’accouchement médicalisé est l’un des meilleurs moyens de garantir la bonne santé de la mère et de l’enfant, qui, parallèlement à l’amélioration de l’accès aux soins prénatals, aux soins obstétriques d’urgence et aux services de planification familiale, compte pour beaucoup dans le recul des décès maternels1, 6, 7.
11. À l’échelle mondiale, l’espérance de vie a augmenté de 5,2 ans.
L’espérance de vie est passée de 64,8 ans en 1994-1995 à 70 ans en 2010-2015. Les pays les moins avancés affichent les progrès les plus notables, avec une hausse de 8,9 ans.
Cependant, partout dans le monde, trop de femmes continuent de mourir jeunes, souvent en raison de facteurs liés à la grossesse ou à l’extrême pauvreté, du fait de leur statut inférieur1, 3.
12. Le nombre d’avortements diminue.
Le taux d’avortement dans le monde a reculé de 35 pour 1 000 femmes en 1995 à 29 pour 1 000 femmes en 2008 en dépit de l’augmentation de la population.
Il est cependant possible de diminuer encore plus ce taux en améliorant l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive, y compris la planification familiale volontaire. Si les besoins en matière de planification familiale étaient satisfaits, on éviterait 54 millions de grossesses non désirées et 26 millions d’avortements1, 5, 9.
13. Le nombre de personnes infectées par le VIH/sida a nettement reculé.
Les nouvelles infections à VIH ont diminué de 33 % entre 2001 et 2012. En dépit de ces progrès, il est possible d’en faire plus pour prévenir la propagation de la maladie, en particulier chez les jeunes. En 2009, 41 % des nouvelles infections à VIH touchaient des jeunes âgés de 15 à 24 ans. Une éducation sexuelle complète adaptée à l’âge aide les jeunes à se protéger contre les infections sexuellement transmissibles, dont le VIH1, 9, 10.
14. Mais l’incidence des principales infections sexuellement transmissibles guérissables a sensiblement augmenté.
Le taux d’incidence des quatre principales infections sexuellement transmissibles guérissables – la syphilis, la gonorrhée, la chlamydia et la trichomonase – a connu une hausse sans précédent chez les personnes âgées de 15 à 49 ans, passant de 333 millions de cas en 1995 à 499 millions en 2008. Cette évolution souligne qu’il est important de fournir aux jeunes les connaissances et les services nécessaires en matière de santé sexuelle et reproductive pour qu’ils restent en bonne santé1, 9.
15. Un nombre plus élevé de personnes décèdent de maladies non transmissibles.
Les décès dus à des maladies non transmissibles, comme les maladies cardiaques, le cancer, le diabète et les maladies respiratoires chroniques, ont augmenté de 30 % entre 1990 et 2010. La plupart de ces maladies sont étroitement liées à quatre comportements nocifs souvent adoptés à l’adolescence : le tabagisme, l’abus d’alcool, l’inactivité et une mauvaise alimentation.
Il est important de donner aux jeunes les moyens de se protéger contre ces dangers et d’autres maux. L’éducation à la santé tout au long de la vie doit commencer dès le plus jeune âge et être accompagnée d’une éducation complète à la sexualité1, 9.
16. Les taux de scolarisation n’ont jamais été aussi élevés – et les filles affichent les progrès les plus notables.
Le taux d’inscription dans le primaire a bondi de plus de 75 % en 1990 à environ 90 % en 2010. Les progrès en matière de scolarisation des filles ont été particulièrement spectaculaires, car leur nombre est désormais égal à celui des garçons dans le primaire dans la majorité des pays. Les filles ayant accès à l’éducation sont mieux armées pour éviter les grossesses pendant l’adolescence et pour accéder aux soins de santé ainsi qu’aux moyens de subsistance. Les filles et leur future famille sont donc en meilleure santé et sont plus susceptibles d’échapper à la pauvreté.
Néanmoins, les inégalités en matière d’éducation persistent et le taux de scolarisation des filles dans le secondaire est encore inférieur à celui des garçons1, 11, 12, 13, 14.
17. Le monde s’urbanise.
La population urbaine mondiale a augmenté de 1,6 milliard entre 1994 et 2014. Plus de la moitié des habitants de la planète vit dans des villes.
Malheureusement, cette croissance survient surtout dans les taudis. Plus de 650 millions de personnes vivaient dans des taudis en 1990 ; elles étaient 820 millions en 2010. Les femmes et les filles pauvres vivant dans les zones urbaines sont particulièrement vulnérables car elles sont moins susceptibles d’avoir accès aux services de santé reproductive, à l’éducation et à la sécurité1, 3, 14.
18. Le nombre de migrations est plus élevé que jamais.
Les migrations internationales n’ont jamais été aussi importantes. En 1990, 154 millions de personnes ont quitté leur pays en quête de nouvelles opportunités. En 2013, elles étaient 232 millions.
Les migrations offrent d’innombrables possibilités et contribuent au développement. Mais elles peuvent également exposer les migrants – en particulier les femmes et les filles – aux mauvais traitements, comme la traite des êtres humains, l’exploitation et la discrimination1, 3, 14.
19. La population mondiale vieillit.
Les personnes âgées, à savoir les individus de plus de 60 ans, constituent la tranche d’âge qui connaît la croissance la plus rapide. Leur nombre est passé de 490 millions en 1990 à 765 millions en 2010.
La communauté internationale doit redoubler d’efforts pour satisfaire les besoins de ce groupe par le biais de la protection sociale et de systèmes garantissant leur sécurité et leur participation réelle à la société1, 3.
20. Les déplacements internes dus à des conflits ou des violences atteignent des records et affectent de manière disproportionnée les femmes et les filles.
La violence sexiste est souvent exacerbée par les conflits et les déplacements ; les mesures de protection disparaissent et la violence sexuelle est utilisée comme tactique de guerre. Il y a vingt ans, le nombre de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays en raison des conflits armés a atteint un niveau sans précédent. Aujourd’hui, leur nombre est encore plus élevé (28,8 millions en 2012). Les causes sont variées : conflit, violence ou violation des droits fondamentaux. On estime en outre à 15,4 millions le nombre de personnes contraintes de fuir leur pays et de se réfugier à l’étranger1, 14.
Il reste encore beaucoup à faire
Dans de nombreux autres domaines, la situation mondiale n’a pas assez évolué.
Les mutilations génitales féminines et l’excision (MGF/E) ainsi que le mariage d’enfants continuent d’être pratiqués dans de nombreuses régions du monde, y compris dans les pays où ces pratiques sont illégales. Chaque année, 3 millions de filles, dont la plupart ont moins de 15 ans, risquent de subir une MGF/E. Si la tendance actuelle se confirme, d’ici 2020, on estime que 142 millions de filles seront mariées avant d’atteindre l’âge de 18 ans.
La violence sexiste continue d’être un fléau mondial. Environ une femme sur trois déclare avoir été victime d’abus sexuels ou physiques, infligés le plus souvent par un partenaire intime. En Asie et dans le Pacifique, d’après une enquête récente menée auprès de 10 000 hommes, un sur quatre a avoué avoir commis un viol.
La discrimination à l’égard des femmes persiste dans toutes les sociétés du monde et l’égalité des sexes n’est pas encore universellement reconnue. Les femmes sont toujours privées de leur droit à l’égalité en matière de possibilités et de capacités nécessaires pour prendre leur vie en main.
Cette semaine, la Commission de la population et du développement des Nations Unies tiendra sa 47e session et abordera ces questions, examinera les progrès accomplis et analysera les efforts importants qui doivent encore être déployés. Comme l’ont prouvé ces 20 dernières années, le développement mondial doit être axé sur les droits fondamentaux, en particulier ceux des femmes et des filles.
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