Le «lobby de Aïn Diab» derrière le limogeage du gouverneur de Casa-Anfa ?

POLÉMIQUE
Le «lobby de Aïn Diab» derrière le limogeage du gouverneur de Casa-Anfa ?

Rachid Afirat, lors de sa nomination en août 2018 au poste de gouverneur de Casablanca-Anfa. AIC PRESS

Le débarquement de Rachid Afirat suscite des interrogations dans le milieu associatif. 
Le ministère de l’Intérieur a évoqué « une mauvaise gestion de la préservation du patrimoine architectural » de la ville, mais des voix s’élèvent pour souligner la concomitance de cette destitution avec les mesures spectaculaires qu’il a prises contre des établissements qui ne respectaient pas les mesures sanitaires

Le communiqué du ministère de l’Intérieur annonçant que le gouverneur de la préfecture d’arrondissements de Casablanca-Anfa a été relevé de ses fonctions pour sa « mauvaise gestion du dossier de préservation du patrimoine historique et architectural de la ville de Casablanca » continue de susciter une vive polémique dans la presse et dans le milieu de la société civile de la capitale économique.

Les raisons non détaillées par le département de Abdelouafi Laftit n’ont visiblement pas convaincu. Si cette décision intervient quelques semaines après l’indignation soulevée par la démolition de bâtiments art déco dans l’arrondissement de Casablanca-Anfa, notamment la villa Mauvillier qui date des années 30, il est souligné que la préservation du patrimoine architectural ne relève pas des attributions du gouverneur, mais plutôt du président de la communauté urbaine et du directeur de l’Agence urbaine habilités à octroyer les permis et dérogations de démolition.

D’ailleurs d’autres bâtiments ont également été démolis ces derniers temps. Entre temps, le 24 avril, un appel d’offres sera lancé pour l’Agence urbaine de Casablanca afin d’élaborer un guide de la rénovation et de la restauration du patrimoine architectural de Casablanca.
La seconde affaire de l’expulsion d’un avocat de son cabinet évoquée officieusement pour expliquer le débarquement de Rachid Afirat nommé par le Roi Mohammed VI en août 2018, et qui avait provoqué le 19 juin un tollé suivi d’un sit-in organisé par les robes noires pour dénoncer ce qu’ils présentent comme étant « une exaction », ne serait pas non plus à l’origine du couperet de Laftit. Plusieurs sources concordantes font plutôt le lien de ce limogeage avec la décision prise par le gouverneur de sanctionner des restaurants pour « non respect des mesures sanitaires ».


LE GOUVERNEUR VICTIME DE MILIEUX INFLUENTS ?
Des vidéos largement partagées sur les réseaux sociaux montrent un agent d’autorité intervenir en soirée dans des restaurants de la corniche de Casablanca, pour constater des manquements évidents : non-port du masque de protection par le personnel, dont notamment ceux opérant au sein des cuisines ou encore non-respect de la distanciation physique entre les clients attablés.

Plusieurs établissements dont le Petit Rocher, Jack’s Club, le Cabestan, ou encore la Cascade se sont vus infliger une fermeture temporaire de 24 à 48 heures, assortie pour certains d’amendes pécuniaires.

Cette vague de contrôles intervient à un moment où le Maroc est passé à la phase 3 de levée de confinement et que le ministère de la Santé a réitéré la nécessité de respecter scrupuleusement les mesures de précaution sanitaire. Un rappel qui suit aussi l’éclosion de clusters, dont les derniers à Tanger, a poussé les autorités à mettre en quarantaine les quartiers infectés, provoquant même un mouvement de désobéissance civile à Beni Mekada après son reconfinement.

Les descentes spectaculaires et de surcroit filmées ont-elles précipité la chute du gouverneur qui a touché les intérêts de personnes influentes ? Des acteurs de la société civile de Casablanca se sont interrogés par voie de presse sur la concomitance de la destitution Rachid Afirat avec sa décision « d’appliquer la loi de manière stricte et courageuse face aux contrevenants », « la justification improbable présentée par le ministère de l’Intérieur ne peut être une coïncidence avec les sanctions appliquées aux restaurants appartenant à des personnes fortunées », ont-ils estimé.
Dans un article particulièrement offensif, le site d’information Goud a blâmé le limogeage de Rachid Afirat, présenté comme la victime expiatoire du « lobby de Aïn Diab », alors que d’autres médias ont souligné que « la décision ambiguë » du ministère de l’Intérieur à l’encontre du gouverneur de Casa-Anfa n’avait pas été prise dans le strict respect des procédures.


Commentaires