LE COUSCOUS DE LA DISCORDE

 

 LE COUSCOUS DE LA DISCORDE

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Entré au patrimoine immatériel de l’Unesco en décembre dernier à l’issue d’un dossier porté par le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et la Mauritanie, le Couscous est devenu un motif de discorde et de querelle sur les réseaux sociaux, ainsi que d’autres composantes du patrimoine marocain. 


Détails.

« Le peuple Marocain s’oppose catégoriquement à l’homogénéisation de son patrimoine. Cette négligence ouvre la porte à l’appropriation culturelle des États voisins et fragilise l’héritage civilisationnel Marocain », c’est l’argument phare d’une pétition électronique qui a déjà recueilli plus de 3.000 signatures.

La pétition adressée au ministre de la Culture défend la valorisation de la spécificité culturelle du Maroc à l’UNESCO. Et c’est le couscous « maghrébin » qui trinque en premier.

En effet, les internautes après coup, estiment que le Maroc ne devait pas accepter de déposer un dossier commun avec l’Algérie, la Tunisie et la Mauritanie pour inscrire le couscous dans le patrimoine immatériel de l’UNESCO.

Peut-être serait-il judicieux de rappeler la messe-basse que comptait faire l’Algérie en annonçant en septembre 2016, le dépôt d’un dossier « couscous » à l’Unesco !

 De ce fait, les circonstances du dépôt d’un dossier commun en mars dernier demeurent à élucider bien qu’il soit tout de même aberrant de refuser le couscous ou un verre d’Atay à ses voisins. Un dossier commun était-ce la seule possibilité pour barrer la route à la velléité d’un hold-up “couscousien”?

La colère de ces internautes, qui semble depuis s’être calmée, est motivée par l’appropriation à tour de bras par l’Algérie, du moins certains Algériens, de plusieurs composantes du patrimoine marocain dont le caftan et la Koutoubia jusqu’à s’attribuer la paternité d’Ibn Battuta figure emblématique marocaine, qu’un média algérien, Achourouq, qualifie d’Algérien, pourtant né et mort au Maroc.

S’en est de trop pour les internautes marocains de voir leurs voisins de l’Est usurper les symboles de l’identité et patrimoine marocains.

Même la photo du siège du ministère de la Culture, de la Jeunesse et des sports est usurpée par un média algérien pour illustrer un article en relation avec le ministère des sports algérien.

Tous ces faits sont relatés, preuve à l’appui, sur les réseaux sociaux, mobilisant les troupes d’internautes prêts à en découdre pour cesser cette usurpation.

Pis, quelques internautes reprochent au ministre d’évoquer le multilatéralisme culturel. Invoquer la protection du patrimoine culturel et civilisationnel est une chose, demande par ailleurs tout à fait légitime (des babouches aux plantes aromatiques et médicinales) ;

Mais il ne faut pas comprendre le multilatéralisme, qui est un mode d’organisation des relations interétatiques dans l’objectif d’instaurer des règles communes, comme un troc de nos cultures respectives. Loin s’en faut.

De même qu’on ne peut pas demander à un haut responsable de faire de l’excès de zèle au risque de tomber dans le cliché de nos voisins dont certains responsables font des sorties médiatiques tambour battant pour nous « gratifier » d’inimitié. Une posture caricaturale peu enviable !

Le récent épisode d’El Guergarat a bien démontré qu’il vaut mieux faire dans la dentelle et enchaîner les succès politiques que d’écumer vainement. Et si nous sommes condamnés au « je t’aime. Moi non plus », alors soit !

Le hasard du calendrier a voulu que ce débat houleux coïncide avec la célébration d’un demi-siècle de la Convention de l’UNESCO de 1970 qui instaure les bases de la coopération internationale en matière de protection du patrimoine culturel.

La culture du dominant

L’histoire l’atteste puisqu’en pays conquérant, le Maroc a exporté sa culture aussi bien en Afrique qu’en Europe. Les conquêtes d’Almoravides en attestent, un exemple parmi d’autres, et forcément, partout où elle est passée, la culture marocaine est implémentée, en tant que pays dominant, chauvinisme mis à part.

Pays d’influence et de confluence, le Maroc est également et de tout temps un réel carrefour des cultures mais aussi des confessions. Pays à l’histoire millénaire et au rayonnement certain, il est également un réceptacle où la culture évolue dans l’échange et la diversité.

En effet, le Maroc n’évoluant pas en vase clos, sa culture par osmose subit également des influences et au fil des siècles, ceci façonne la culture et explique la richesse du patrimoine d’aujourd’hui, qui font du Maroc une véritable mosaïque, comme disait feu Hassan II.

Et qui ne succombe pas aux charmes du Maroc et de son patrimoine ? Cela doit même être un motif de fierté. Et la culture est un bien commun de l’humanité et un vecteur de rapprochement des peuples et d’atténuation des adversités.

Ceci étant, le patrimoine marocain n’est pas seulement à préserver mais à promouvoir et ce n’est pas de l’unique responsabilité d’un ministère mais de tout Marocain, ambassadeur de son identité culturel et civilisationnel.

On ne peut défendre le patrimoine pour qu’il reste otage des livres d’histoire et des expositions aux musées (où on se bouscule pas par ailleurs). Globalisation oblige, beaucoup de Marocains vivent à l’air du temps, troquant la beauté du salon marocain pour un canapé douillet ou le bon tagine marocain pour la junk food. Ce n’est pas un blâme mais un constat.

Il ne s’agit nullement de devoir partir au bureau en burnous et babouche (et encore le burnous est d’une élégance majestueuse), mais juste d’entretenir la beauté de notre singularité marocaine tout en restant ouvert sur le monde, en visitant des monuments témoins de l’histoire glorieuse du pays ou encore porter les chefs d’œuvre des mains de nos artisans détenteurs d’un savoir ancestral en voie d’extinction (et lire et relire notre histoire).

Car nul héritage n’a de valeur s’il n’est pas transmis. Sur ce, bon couscous du vendredi à toutes et à tous !

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