Maroc : Quid de la liberté de conscience « garantie » par la Constitution

Maroc : Quid de la liberté de conscience « garantie » par la Constitution 
Maroc : Quid de la liberté de conscience « garantie » par la Constitution ?

Garantie par la nouvelle Constitution, la liberté de conscience n’en demeure pas moins un leurre sur papier quand on voit les réalités sur le terrain. 

Et le mois de Ramadan ne cesse de nous le rappeler tous les ans, comme en témoigne une caméra cachée pour le moins édifiante.

La nouvelle avait réjoui les minorités en 2011. Le Maroc, par le biais de sa nouvelle Constitution, avait fait un pas important en matière de libertés individuelles en garantissant la liberté de conscience pour tous. Pourtant, si sur le papier les Marocains bénéficient de cette « garantie », la réalité sur le terrain est toute autre. Le dernier rapport sur la liberté de religion, publié par le département d’État américain, tire la sonnette d’alarme sur le cas du Royaume chérifien où on dénombre plusieurs faits qui vont à l’encontre même de ce que dit la Constitution.
Ainsi, du côté de l’État, plusieurs citoyens Marocains ont été arrêtés à cause de leurs croyances, spécifiquement ceux qui sont de religion chrétienne ou issus du courant chiite. Le cas le plus récent, et qui a défrayé la chronique en avril dernier, a été celui d’un Marocain chrétien qui a été enfermé durant 24 heures sans aucune explication et sans qu’aucun procès verbal ne soit dressé. Nous apprenions plus tard qu’il était suspecté de prosélytisme [ce qui est interdit par l’article 220 du code pénal, NDLR]. Accusations qui ont été complètement réfutées par son avocat. Plus loin encore, en mai 2016, un leader chiite, Abdou El Chakrani, avait été arrêté pour « irrégularité financière ». Pourtant, selon ses proches, El Chakrani avait été emprisonné pour ses croyances religieuses et pour avoir tenté d’enregistrer une association affiliée à des leaders chiites. Pour couronner le tout, la restriction de la distribution de matériels religieux non islamiques se greffe aussi à la liste des incohérences dressée dans ce rapport et qui pointe du doigt l’hypocrisie de l’État, qui ne respecte pas ses engagements en termes de libertés individuelles.

De plus, l’article 222 du code pénal marocain qui stipule : « Celui qui, notoirement connu pour son appartenance à la religion musulmane, rompt ostensiblement le jeûne dans un lieu public pendant le temps du Ramadan, sans motif admis par cette religion, est puni de l’emprisonnement d’un à six mois ainsi que d’une amende », ajoute une ombre supplémentaire au tableau. Ce dernier étant contradictoire avec la « liberté de conscience » tant prônée par le Maroc post printemps arabe.

Du côté de la société civile, ce n’est pas mieux

La liberté de conscience demeure un concept incompris de la société Marocaine. En effet, et spécifiquement pendant le mois de Ramadan, les agressions se multiplient à l’encontre des Marocains qui mangent, boivent ou fument publiquement en plein jour. En témoigne cette caméra cachée, réalisée par nos confrères de Chouf TV, qui fait le buzz depuis dimanche soir et qui rouvre un débat, pour le moins épineux, sur le droit ou non de l’individu de manger en public pendant le mois sacré. Dans cette vidéo d’un peu moins de neuf minutes, l’acteur explique qu’il va tester les réactions des passants en faisant semblant de boire de l’eau en plein jour… et les réponses ne se sont pas faites attendre. 
D’entrée de jeu, il se fait attaquer verbalement par un individu qui l’agresse en lui demandant son appartenance religieuse tout en l’accusant de lui « faire du mal », quand un autre le menace d’appeler la police. D’autres s’en prennent à lui physiquement en le sommant de respecter la religion musulmane. Effet boule de neige oblige, la situation a failli dégénérer et l’acteur s’est résigné à arrêter la caméra cachée au moment où les choses commençaient à prendre une mauvaise tournure.

Les « victimes » de cette supercherie, une fois calmes, ont pour la plupart expliqué que leurs réactions étaient tout à fait « légitimes », qu’ils étaient motivés par la volonté de « protéger la religion musulmane » et qu’il n’était pas concevable qu’un individu – musulman en sus – s’amuse à manger ou à boire au vu et au su de tous.
Si la blague s’est « bien » terminée au final, elle n’en demeure pas moins criante de vérité, sachant que tous les ans, les faits divers débordent d’histoires d’agressions des « déjeûneurs » ou de leurs arrestations.

La liberté de conscience, dont le débat pointe le nez tous les ans à la même période, reste pour le moment un simple leurre et le chemin risque d’être très long, tant du côté de l’État que du citoyen.

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