Un ex-agent secret fracasse les fake news utilisées par l’Occident dans ses guerres.

Un ex-agent secret fracasse les fake news utilisées par l’Occident dans ses guerres.




Comment les fausses nouvelles contribuent-elles à justifier les conflits internationaux ? 
Dans un ouvrage décapant, «Gouverner par les fake news», Jacques Baud, un ex-agent secret suisse, dénonce l’emploi des infox par les pays occidentaux. Entretien.


C’était il y a plus de trois ans, quelques mois avant l’élection d’Emmanuel Macron. Richard Ferrand, alors secrétaire général de En Marche, publiait une tribune dans Le Monde intitulée «Ne laissons pas la Russie déstabiliser la présidentielle en France!». Un texte grandiloquent où il affirmait notamment que «deux grands médias, Russia Today et Sputnik, qui appartiennent à l’État russe» font «au quotidien de la diffusion, de la propagation de fausses nouvelles».

Tandis que François Fillon était empêtré dans le Penelopegate, l’argument de l’ingérence russe –déjà massivement utilisé aux États-Unis– avait permis d’affermir la candidature Macron, estime Jacques Baud, ancien agent des services de renseignement suisses, ayant travaillé à l’Onu puis à l’Otan. Construction d’un ennemi ou coup de com’ électoral?

Les spéculations sur le péril russe continueront d’être alimentées par les médias mainstream, chercheurs et politiques lors de la crise des Gilets jaunes et les élections européennes. La menace russe pèse-t-elle sur l’Occident? Celui qui a travaillé longtemps «à l’étude de la menace soviétique» répond: «Non, absolument pas». Le colonel Jacques Baud, auteur du livre Gouverner par les fake news, (Éd. Max Milo), qualifie ainsi la manœuvre de «distorsion des faits».

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Véritable pamphlet contre les services de renseignement, diplomates, politiques et médias, Gouverner par les fake news déconstruit en règle les infox produites par les pays occidentaux depuis quelques dizaines d’années. L’internaute n’y dénichera pas d’informations sensibles sur la mort de Kennedy, mais il y trouvera une grille de lecture afin d’appréhender les réalités stratégiques internationales. Jacques Baud accumule une compilation de dossiers accablants afin d’«inspirer un doute raisonnable sur la manière dont nous sommes informés.»
Les mensonges, boucliers de la démocratie?

Héritage de la campagne présidentielle américaine de 2016, le terme de fake news a régulièrement été accolé à Donald Trump et ses saillies provocatrices. Proposant une hiérarchie de ces bobards, Jacques Baud estime que les plus dangereux sont ceux qui «manipulent les faits de sorte à créer une cohérence factice autour d’une apparence de vérité, afin de fausser la perception d’un auditoire et de le pousser à adhérer à une politique.»

De nombreux États tels que la Syrie, l’Iran, la Russie, le Venezuela ont tour à tour subi et continuent à être la cible de récits tronqués, d’infox de la part des Européens et Américains. Pour quel effet final recherché? «La fake news vient en appui d’une politique», soit la fabrication d’un ennemi, le lancement d’une intervention ou encore un changement de régime. 


L’intervention américaine en Irak en 2003, justifiée par le somptueux bobard de Colin Powell, Secrétaire d’État américain, brandissant une soi-disant fiole d’anthrax à la tribune des Nations unies n’en est qu’un exemple parmi d’autres.


«De nombreux conflits ont été déclenchés dans le monde par de fausses nouvelles. Les fausses nouvelles servent à acquérir en fait l’opinion publique en faveur d’un gouvernement. Le vrai problème des fake news, c’est qu’elles faussent notre vision des problèmes et elles tendent à anesthésier un peu la volonté populaire. On a des guerres qui sont faites sans volonté populaire.»

C’est le cas également de l’assassinat du général iranien Qassem Soleimani par des frappes américaines le 3 janvier 2020. Le prétexte officiel? Celui-ci préparait des opérations contre quatre ambassades américaines au Moyen-Orient, une «menace imminente» selon Donald Trump. Quelques jours plus tard, la version du Président américain a changé, l’«horrible passé» de Soleimani justifierait tout simplement cette «opération homo» (assassinat ciblé).
Médias et services secrets, les relations troubles

Régulièrement, les responsabilités d’interventions sont attribuées aux seuls politiques, notamment l’aventure de Nicolas Sarkozy et de Bernard Henri-Lévy en Libye en 2011. Sont-ils les seuls à mettre en cause? Quel rôle peut-on imputer à la DGSE, au MI6 ou encore à la CIA? L’ancien agent secret considère que le service de renseignement doit représenter un «mètre étalon de l’information pour un décideur stratégique. 
C’est ça sa fonction. C’est de lui dire, la situation elle est comme ça. 
Après, vous décidez ce que vous voulez». Et selon lui, les services occidentaux pèchent «à analyser objectivement et factuellement» les situations.

C’est pourquoi il dénonce cette «rigidité intellectuelle» dont font preuve diplomates et militaires à pratiquer d’une autre façon la guerre, à ne «concevoir que la tactique au détriment de la stratégie globale». En 2019, un article paru dans la Revue Défense Nationale du colonel Legrier critiquait dans ce sens la stratégie militaire de la coalition en Irak, faite de bombardements meurtriers en donnant «à la population une détestable image de ce que peut être une libération à l’occidentale.»



Jacques Baud pourfend les renseignements, 
les politiques, mais aussi le milieu de la presse tout entier, qui serait coupable de suivisme à l’égard des chancelleries occidentales. Les médias centraux français en prennent notamment pour leur grade. 
Celui-ci leur reproche ainsi de «masquer une partie de la réalité», en soutenant, dans le cas du Venezuela, des «entreprises qui contreviennent au droit international et à l’État de droit». Plus en amont, Jacques Baud insiste sur la sélection des sources d’information.
«Je n’ai rien contre le fait qu’on s’adresse à l’opposition pour avoir de l’information, mais cette information, on se rend bien compte qu’elle ne peut pas être prise au sens strict. 

Elles doivent être mises en relation avec des sources venant de l’autre côté. Typiquement pour la Syrie, on a une information qui semble venir pratiquement exclusivement de l’opposition. L’opposition c’est quoi ? 
C’est des djihadistes. 
Donc en réalité, la presse fait la propagande djihadiste d’une certaine manière.»


Sce : Sputnik

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