Affaire Khashoggi : Riyad nie toute intention de « tuer », Trump promet un « châtiment sévère »
Le journaliste dissident Jamal Khashoggi n’a plus donné signe de vie depuis qu’il s’est rendu le 2 octobre au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, en Turquie.
L’Arabie saoudite a démenti samedi 13 octobre, pour la première fois dans l’affaire Jamal Khashoggi, toute intention de « tuer » le journaliste dissident disparu à Istanbul, avant des rencontres turco-saoudiennes prévues ce week-end.
Répondant aux théories qui « circulent sur des ordres pour tuer le journaliste dissident Jamal Khashoggi », le ministre de l’intérieur saoudien a dénoncé dans une déclaration officielle des « mensonges sans fondement ». Riyad est « attaché à ses traditions de respect des règles et des conventions internationales », a ajouté le ministre, le prince Abdel Aziz ben Saud ben Nayef, cité par l’agence de presse gouvernementale SPA.
M. Khashoggi, éditorialiste critique du pouvoir saoudien et collaborateur du Washington Post, n’a plus donné signe de vie depuis son entrée pour des démarches administratives le 2 octobre au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul.
Si les autorités saoudiennes ont rapidement jugé « infondées » les affirmations selon lesquelles le journaliste avait été assassiné dans ce consulat, elles étaient depuis restées cantonnées dans leur silence. Hormis pour signifier que les caméras du consulat ne fonctionnaient pas ce jour-là.
Une « montre intelligente »
Le ministre saoudien s’est aussi félicité vendredi soir de la mise en place d’une coopération avec la Turquie pour éclaircir les circonstances de cette disparition, qui a provoqué des tensions entre l’Arabie saoudite, la Turquie et les Etats-Unis, où le journaliste s’était exilé en 2017. Une source diplomatique turque avait déclaré plus tôt qu’une délégation saoudienne était arrivée à Ankara. Selon l’agence de presse turque Anatolie, elle devait rencontrer des responsables turcs pendant le week-end.
Dans un communiqué en anglais, SPA cite une source officielle saoudienne anonyme exprimant sa « confiance absolue dans la capacité de l’équipe de travail conjointe (...) pour mener à bien sa mission de la meilleure façon possible ».
Les tensions entre Riyad et Ankara s’étaient avivées lorsque des responsables turcs avaient affirmé que le journaliste avait été assassiné par des agents saoudiens.
L’Arabie saoudite maintient qu’il a quitté le bâtiment, sans présenter de preuve toutefois.
Vendredi, les quotidiens turcs Sözcü et Milliyet ont rapporté que M. Khashoggi portait, lorsqu’il est entré au consulat, une « montre intelligente » connectée à un téléphone qu’il avait laissé entre les mains de sa fiancée, Hatice Cengiz. Les deux journaux affirment que des enregistrements audio ont ainsi été transmis au téléphone et sont actuellement examinés par la justice turque.
Toutefois, si Milliyet écrit que des cris et une querelle ont été enregistrés, Sözcü avance que des dialogues, mais pas de cris, peuvent être entendus dans cet enregistrement de « quelques minutes ».
Le Washington Post avait auparavant soutenu qu’Ankara aurait affirmé à Washington détenir des enregistrements audio et vidéo montrant comment Khashoggi a été « interrogé, torturé puis tué » à l’intérieur du consulat, avant que son corps ne soit démembré.
Trump menace d’un « châtiment sévère »
L’affaire a suscité une forte préoccupation dans plusieurs pays occidentaux, dont le Royaume-Uni et la France.
Emmanuel Macron a ainsi déclaré à France 24 et à RFI, vendredi, à l’issue du sommet de la francophonie à Erevan, que les faits concernant la disparition du journaliste saoudien étaient « très graves ». « J’attends que les vérités et la clarté complète soient établies », a dit le président français, qui compte s’entretenir « dans les prochains jours » avec ses homologues concernés.
Pour le président des Etats-Unis, Donald Trump, l’Arabie saoudite pourrait être derrière la disparition du journaliste. « Pour l’instant, ils démentent (leur implication) et la démentent vigoureusement. Est-ce que ça pourrait être eux ? Oui », a dit le président dans un entretien à la chaîne CBS, enregistré jeudi et diffusé samedi, ajoutant que si l’Arabie saoudite s’avérait effectivement responsable, il y aurait « un châtiment sévère ». Donald Trump a néanmoins réitéré son opposition à une suspension des ventes d’armes à Riyad, en expliquant qu’il ne voulait pas pénaliser l’emploi aux Etats-Unis.
La directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, s’est elle dite samedi « horrifiée » par l’affaire Khashoggi, tout en confirmant son intention de participer néanmoins au sommet économique « Davos du désert », à Riyad.
L’affaire Khashoggi a aussi refroidi des investisseurs qui s’enthousiasmaient encore il y a un an pour les projets économiques pharaoniques du prince héritier, tel le milliardaire britannique Richard Branson, qui a gelé plusieurs projets dans le royaume.
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