Vaccin anti-Covid : Attention à cette vidéo de Martine Wonner qui contient plusieurs affirmations trompeuses.

 

Vaccin anti-Covid : Attention à cette vidéo de Martine Wonner qui contient plusieurs affirmations trompeuses


La députée Martine Wonner, filmée à l'arrière d'une voiture, fait plusieurs affirmations anxiogènes autour de la vaccination anti-Covid et de ses "effets secondaires", dans une vidéo partagée des milliers de fois sur Facebook en trois jours. Mais ses arguments censés prouver qu'il "n'y a pas de raison de se faire vacciner" sont fondés sur des allégations trompeuses : le bénéfice-risque de la vaccination est positif, comme l'expliquent nombre d'experts et autorités de santé. Quant aux compagnies aériennes, elles n'interdisent pas leurs avions aux vaccinés, contrairement à ce que dit la députée ex-LREM.

Cette vidéo de 2'44 a été partagée au moins 8.500 fois sur Facebook depuis le 25 juin. On y voit Martine Wonner filmée à l'arrière d'une voiture conduite par un chauffeur. Vraisemblablement filmée par ce dernier, elle dit être "avec un chauffeur tout à fait sympathique ce matin" qui, dit-elle, lui "propose de (vous) adresser un message tout simple".

Martine Wonner, psychiatre et députée du Bas-Rhin, a été exclue du groupe LREM en 2020 pour son vote contre la stratégie de déconfinement du gouvernement. Comme expliqué dans cette dépêche AFP du 2 juin, un collectif de médecins a saisi l'Ordre des médecins contre l'élue, qui relaie régulièrement de fausses allégations autour du Covid. L'AFP Factuel a déjà consacré deux articles à la démystification de ses propos.

Dans cette nouvelle vidéo datée du 25 juin, Mme Wonner déconseille à la population de se faire vacciner ("il n'y a pas de raison de se faire vacciner", "la vaccination, laissez-là de côté") et fait de nouvelles affirmations trompeuses.

"Je n'ai qu'un seul message à vous passer ce matin: soyez prudent par rapport à cette vaccination", commence-t-elle, avant de dérouler son argumentaire.

Effets secondaires

"Il y a beaucoup beaucoup beaucoup beaucoup d'effets secondaires, il y a malheureusement des gens qui perdent la vie, vous avez vu, avec toutes ces thromboses", affirme la députée.

Ces affirmations manquent de contexte et en deviennent trompeuses car elles laissent croire que les effets secondaires des vaccins anti-Covid seraient à la fois extrêmement fréquents et très graves.

Depuis le début des campagnes de vaccination, dont les premières ont débuté au mois de décembre 2020, les produits et leurs effets indésirables sont surveillés comme le lait sur le feu par les autorités nationales et supranationales, dans le monde entier. Ils sont recensés et analysés par des experts, les chiffres et leurs analyses faisant souvent l'objet de communications publiques.


Le 25 juin, l'ANSM a indiqué : "Au 10 juin 2021, pour un total de plus de 42 millions d'injections en France, près de 49.000 déclarations d'effets indésirables ont été analysées par les CRPV (Centre régionaux de pharmacovigilance, NDLR). La grande majorité de ces effets indésirables sont attendus et non graves. Ces premières données de surveillance, ainsi que la surveillance réalisée au niveau européen et mondial, confirment la balance bénéfice/risque favorable de l'ensemble des vaccins utilisés en France dans les populations ciblées par la stratégie vaccinale".

Les effets indésirables des vaccins anti-Covid les plus fréquents sont connus depuis les essais cliniques : douleur au point d'injection, fièvre, nausée, état pseudo-grippal, qui passent en général en quelques heures ou quelques jours.

Il est en revanche exact que certains vaccins, en particulier ceux de Johnson & Johnson (appelé Janssen en Europe) et d'AstraZeneca, sont soupçonnés d'engendrer de très rares cas de thromboses (caillots sanguins) atypiques.

 
Vaccination en Turquie le 28 juin 2021 ( AFP / ADEM ALTAN)

L'Agence européenne des médicaments a annoncé en avril 2021 que les caillots sanguins devaient figurer sur la liste des effets secondaires "très rares" des vaccins Covid-19 d'AstraZeneca et de Johnson & Johnson. Elle avait analysé 86 cas de thrombose, dont 18 mortels, sur plus de 25 millions de vaccinés. Au 4 avril, environ 120 cas avaient été rapportés en tout sur la base européenne EudraVigilance sur les effets secondaires, sur 34 millions de vaccinés.

Le mois suivant, elle a déclaré qu'en revanche il n'y avait "aucune indication à ce jour" permettant de suspecter un lien entre les vaccins à ARN messager (Moderna et Pfizer) et les thromboses.

L'Agence européenne des médicaments (AEM) et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommandent néanmoins de continuer à utiliser les sérums d'AstraZeneca et Johnson & Johnson , jugeant leurs bénéfices supérieurs à leurs risques.

C'est aussi ce que rappelle l'Inserm dans cet article d'avril consacré sur son site à ces cas de thromboses, en évoquant une étude menée par le Pr David Smadja, professeur d’hématologie à l'Université de Paris et membre du service d’hématologie de l’hôpital européen Georges-Pompidou AP-HP. : "Malgré la survenue d'effets secondaires très rares, le Pr. Smadja réaffirme que les bienfaits du vaccin dans la lutte contre l'épidémie de COVID-19 l'emportent très largement sur le risque d'effets secondaires".

"Aujourd’hui (à fin avril, NDLR), c'est plus d'une cinquantaine de cas qui sont décrits dans le monde, ce qui reste extrêmement rare au vue du nombre de personnes vaccinées", disait aussi l'Inserm. Le 1er mai à 11H00 GMT, plus d'1,13 milliard de doses avaient été injectées dans le monde entier.

Au 28 juin, au moins 2,969 milliards de doses de vaccins anti-Covid ont été administrées dans au moins 216 pays ou territoires, selon un comptage réalisé par l'AFP à partir de sources officielles à 13:03 GMT.

 

Le "traitement précoce"

"Le traitement précoce fonctionne toujours. L'hydroxychloroquine, l'azithromycine, l'ivermectine avec s'il faut, des anticoagulants et parfois un peu de corticoïdes donc il n'y a pas de raison de se faire vacciner", affirme Mme Wonner.

L'élue fait référence ici à un soi-disant protocole de soins contre le Covid-19, diffusé depuis février plusieurs canaux sur les réseaux sociaux, dont l'association Reinfocovid ou le collectif "Laissons les médecins prescrire", deux organisations fréquentes vectrices de désinformation.

Dans ce document sont proposés une "prévention Covid-19" et un "traitement ambulatoire précoce" mentionnant pêle-mêle notamment sophrologie, zinc, vitamine C, homéopathie, vitamine D, ivermectine, hydroxychloroquine… pour prévenir le Covid et même traiter les malades atteints.

Mais les techniques, méthodes et substances listées dans ce document n'ont à ce jour pas fait la preuve d'une efficacité préventive ou curative contre le Covid, comme expliqué dans cet article d'AFP Factuel du 12 février dernier. Citée abondamment depuis le début de la pandémie, l'hydroxychloroquine - associée ou non à l'azithromycine - n'est pas considérée comme un traitement efficace du Covid. Quant à l'ivermectine, son efficacité n'est toujours pas étayée contre le Covid, faute de données suffisantes.

Les corticoïdes sont utilisés en cas de Covid mais pour certaines formes graves seulement. En septembre, l'Organisation mondiale de la santé a décidé de recommander "l'utilisation de corticostéroïdes [ou corticoïdes, NDLR] systémiques pour le traitement des patients atteints d’une forme grave ou critique de COVID-19".

L’OMS assortissait néanmoins cela de précautions importantes : "ne pas utiliser de corticostéroïdes pour traiter les patients atteints d'une forme bénigne de la maladie car, dans cette situation, le traitement ne présente aucun avantage et pourrait même s'avérer nocif. Le traitement doit être pris sous surveillance médicale".

Quant aux "anticoagulants", des scientifiques tentent d'établir si "l'anticoagulation avant hospitalisation serait un facteur de protection potentiel contre les complications de la COVID-19".

En tout état de cause, le "protocole" évoqué par Martine Wonner inquiète nombre de médecins. Interrogé par l’AFP le 11 février, le Conseil national de l’ordre des médecins avait indiqué avoir "écrit à la Haute autorité de santé (HAS) et à l'Agence du médicament (ANSM) pour leur demander de vérifier la conformité de ce protocole avec les données acquises de la science".

Dans un communiqué le 2 juin, le collectif de médecins No#FakeMed, qui lutte contre la désinformation en santé, a annoncé saisir l'Ordre des médecins à l'encontre de Martine Wonner, en particulier en raison de sa promotion de ce protocole.

En février, le collectif avait jugé "que la présentation d'un protocole médical en dehors de toute validation scientifique auprès du grand public constitue une mise en danger de la vie d'autrui. D'autant qu'elle y préconise également des associations contre indiquées et donc dangereuses ".

Vaccination et avion

"Il y a même aujourd'hui des compagnies aériennes qui interdisent aux gens qui sont vaccinés de prendre l'avion", dit Martine Wonner. Comme déjà expliqué dans cet article de l'AFP Factuel du 15 juin, c'est faux.

 
Un avion en février 2021 à Belgrade ( AFP / ANDREJ ISAKOVIC)

Interrogée le 3 juin 2021, la porte-parole de l'association de compagnies aériennes Airlines for Europe, qui représente 70% du transport aérien en Europe, a assuré à l'AFP qu'"aucune discussion n'a lieu entre les compagnies aériennes pour interdire ou empêcher les voyageurs vaccinés ou même non vaccinés de prendre l'avion".

"La vaccination est un élément crucial de la gestion de la pandémie, et l'augmentation des niveaux de vaccination permet le retour progressif de la libre circulation, y compris pour les voyages aériens", a déclaré la porte-parole le 3 juin 2021.

L'Association internationale du transport aérien (Iata), avait également indiqué à l'AFP en mai qu'elle n'avait "connaissance d'aucune réunion entre les compagnies aériennes pour discuter du fait de ne pas transporter des passagers vaccinés".

Interrogée de nouveau par l'AFP le 28 juin sur la même question, Iata a confirmé sa réponse et indiqué être "favorable à ce que les personnes vaccinées puissent voyager sans restriction".

 

Enfants et vaccins

"Vous savez que la vaccination pour les enfants est autorisée (... ), ce vaccin ne sert à rien pour eux parce que les enfants ne sont pas morts du Covid donc surtout qu'ils n'aillent pas se faire vacciner", dit Martine Wonner, qui fait là plusieurs approximations trompeuses.

Premièrement, ce n'est pas exactement la vaccination des enfants qui vient d'être autorisée en France mais celle des adolescents. Comme récapitulé dans cette dépêche AFP du 14 juin, la vaccination des mineurs de plus de 12 ans a été ouverte en France le 15 juin sous certaines conditions.

Deuxièmement, même si pour les plus jeunes les risques de Covid graves et de décès sont très très rares, ils ne sont pour autant pas inexistants, en particulier pour des jeunes présentant des comorbidités, comme expliqué sur le site de l'agence sanitaire officielle américaine CDC ou ici par la Haute autorité de santé.

Comme expliqué dans cette dépêche AFP de mars 2020, des cas de décès d'adolescents dus au Covid ont été rapportés, notamment une jeune française de 16 ans.

D'après cet article de la BBC d'avril, des centaines de très jeunes enfants seraient morts du Covid au Brésil.

De plus, même si les bénéfices médicaux individuels sont plus réduits pour les plus jeunes en bonne santé que pour les adultes, il existe des bénéfices psychologiques individuels pour les adolescents et les enfants d'une part ainsi que, d'autre part, des bénéfices médicaux collectifs pour toute la société, puisque les plus jeunes peuvent aussi transmettre le virus.

La Haute autorité de Santé a considéré le 3 juin que "la vaccination des adolescents présente des bénéfices individuels et collectifs" car"la vaccination des adolescents sera à même de diminuer la circulation virale, de permettre aux adolescents de retrouver une vie sociale plus normale et de maintenir leur accès à l'éducation, en évitant notamment la fermeture de classes dans les établissements scolaires", dit-elle.

Le 13 juin, le Pr Alain Fischer, "Monsieur vaccin" du gouvernement, a estimé aussi qu'il y avait bien un "bénéfice individuel au sens social et psychologique" par "ils paient un trop lourd tribut à la pandémie" avec des décrochage scolaires et des impacts psychologiques très lourds pour les jeunes privés de scolarisation par les classes fermées.

Alain Fischer considère que la vaccination des ados est aussi rendue nécessaire par une logique arithmétique, de façon à se rapprocher d'une immunité collective qui sera bénéfique à toutes les tranches d'âge. "C'est un impératif arithmétique: pour parvenir à l'immunité de groupe, il faut vacciner 90% des 12 à 100 ans ; si bien qu'elle restera hors d'atteinte même en vaccinant la quasi-totalité des adultes", avance Alain Fischer.

28 juin 2021 Modifie la photo de tête

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