Le marché du matériel de BTP relève progressivement la tête. Malgré le ralentissement général constaté au 1er semestre 2020 suite au retard de formation du gouvernement, une croissance de l’activité de l’ordre de 15% est attendue cette année par les professionnels.
Cette progression devrait intervenir après une année 2016 tout aussi favorable ayant enregistré un volume de vente de 700 unités, en hausse de 15% par rapport à 2015.
Un vent favorable souffle donc sur le secteur depuis deux ans et ce, grâce aux projets structurants lancés par le pays ces dernières années : Tanger Med II, Nador West Med, LGV, OCP, Programmes de développement des grandes villes… Toutefois, le marché du matériel de BTP est encore loin d’atteindre sa taille d’il y a 10 ans. En effet, les ventes se situaient à 1 000 engins neufs par an contre 700 l’année dernière. Il faut dire que la location et l’importation de matériel d’occasion des pays européens, deux phénomènes qui avaient fait chuter le marché à 500 unités en 2013, pèsent toujours sur le secteur.
Najib Taouni EL Kaddouri, directeur d’Ubaristi Maroc, affirme que «le marché marocain est saturé par les machines d’occasion. Et quand je dis d’occasion, je veux parler des machines dont les fabricants ont déjà cessé de produire les pièces de rechange, puisque ces machines sont interdites d’utilisation selon les réglementations internationales de l’environnement». Une bonne partie de ces importations sont réalisées par des entreprises étrangères de BTP qui décrochent des marchés publics au Maroc et ramènent leurs propres machines en admission temporaire au lieu d’acheter du matériel localement.
Par ailleurs, attirés par le dynamisme du segment grâce aux multiples chantiers lancés par le Maroc au cours de la dernière décennie, de nombreux spécialistes de la location, locaux ou étrangers, sont apparus sur le marché. Ils proposent du matériel à des prix très abordables et avec toutes les prestations annexes d’entretien et de maintenance, permettant ainsi aux professionnels du BTP de se concentrer sur leur métier de base.
Aujourd’hui, une vingtaine d’opérateurs constituent le marché de la distribution de matériels BTP. Ils réalisent un chiffre d’affaires global de 4 milliards de dirhams et assurent 6 000 emplois (1 000 directs et
5 000 indirects). Avec cette taille, le marché marocain est loin de pouvoir rivaliser avec ses voisins. A titre de comparaison, les ventes de matériel neuf sont de l’ordre de 12000 unités pour le marché turc, 5 000 unités pour le marché algérien et 1 000 unités pour la Tunisie. Entre autres raisons, ses pays ont depuis plusieurs années interdit ou réglementé l’importation du matériel d’occasion.
Du coup, le Maroc est devenu le principal débouché pour ces engins d’occasion en provenance d’Europe. «Comparativement à des pays de même niveau de développement, et tenant compte des investissements opérés dans les infrastructures et le bâtiment, nous restons très en dessous de nos attentes», se désole Jaâfar Tahiri, président de l’Association des importateurs de matériel de BTP (AIM BTP) qui rassemble la vingtaine d’importateurs de matériel neuf en activité au Maroc. En plus du faible rendement et des incidences négatives évidentes sur les plans économique, social, fiscal et environnemental, les importations non régulées de matériels d’occasion engendrent d’autres effets néfastes tel que les risques de transfert illégal de devises.
Dans ce contexte, l’AIM BTP a fait part au gouvernement du problème de l’importation massive de matériel d’occasion. Dans le cadre du contrat-programme qui devrait être signé lors du BTP Expo, «nous comptons sur les pouvoirs publics pour nous accompagner dans l’organisation et la régulation du marché à travers trois mesures : l’interdiction de l’importation de matériel BTP d’occasion dépassant 5 ou 7 ans selon l’usage et la nature du matériel, l’interdiction des importations de matériel BTP en admission temporaire pour favoriser les entreprises nationales de BTP et enfin l’instauration d’incitations aux entreprises qui investissent dans du matériel neuf», nous explique le président de l’association.
Il faut noter que l’âge moyen du parc au Maroc est de 9 ans, et que 40% des engins ont plus de 10 ans. Cette vétusté du parc entraîne plus de consommation de carburant et présente une menace accrue pour la sécurité des conducteurs et des travailleurs, et conduit à davantage de retards dans les chantiers, occasionnant des surcoûts pour les administrations et la collectivité dans son ensemble. En limitant l’importation d’engins d’occasion vétustes, et en reportant les achats sur le neuf ou sur l’occasion plus jeune, la qualité du parc au Maroc sera nettement améliorée, enclenchant progressivement un impact vertueux sur les émissions de gaz à effet de serre.
Ce poids élevé de l’occasion induit aussi des effets néfastes sur le développement économique du pays : pratiques frauduleuses, concurrence déloyale d’entreprises individuelles au détriment d’opérateurs structurés, et compétition agressive entrainant une guerre des prix qui tire tout le secteur vers le bas.
«Concernant cette 5e édition du BTP Expo, l’AIM BTP se mobilise aux côtés de la FNBTP (Fédération nationale du bâtiment et travaux publics) pour affronter les défis futurs et lever les contraintes qui freinent l’essor de nos entreprises», conclut M.Tahiri.
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