La fin du monde, expliquée à ceux qui ne veulent pas mourir en Novembre !

La fin du monde, expliquée à ceux qui ne veulent pas mourir en Novembre !





« C’est le chatiment :... Faites pénitence !... La fin des temps est venue !.. »
 C’était dans « Tintin et l’étoile mystérieuse », une page absolument terrifiante….
Pendant longtemps j’ai cru que les histoires de fin du monde n’étaient au fond que de la blague.

Les années 60 ont abordé la chose mais voyaient ça avec détachement. Un peu comme des gamins qui considèrent qu’en Juillet, assis sur le bord d’une piscine, c’est bien inutile de penser à la rentrée des classes, et qu’il vaut bien mieux penser aux heures de baignades et aux filles.

     « Après moi la fin du monde.. » Comme disait déjà Louis 15... On le voit, le sarcasme, le jean-foutre et le déni ne datent pas d’hier.. En étant optimiste, on pourrait considérer que ceux qui font des livres sur le sujet nous montrent que tout va encore bien. N’y a-t-il pas un quidam assez repu, disposant d’assez de temps, de moyens et de réseau, pour se permettre de se lancer dans ce genre d’histoire, au lieu de chercher un peu de nourriture parmi les décombres radioactives ?
     Car je vous le dis, mes frères, moi qui ai exploré les chapitres de l’apocalypse, une chose est quasi certaine : Non seulement la fin du monde mettra un terme aux agissements des immortels de l’académie française, et à ceux du prix Goncourt, mais elle coupera toute ambition littéraire aux survivants.
    A quoi bon en effet écrire dans un monde où il n’y a plus de valeurs, de lecteurs ? Ou les horloges se sont arrêtées, et où relire « A la recherche du temps perdu » s’apparenterait à rechercher un monocle dans la cuve d’un réacteur nucléaire éventré.

   Le mieux, pour en apprécier le sel corrompu, c’est de lire ce genre d’histoire avant que la catastrophe finale n’arrive. Disons dans une période de doute, d’incertitude planétaire…. Ainsi on apprécie bien mieux les histoires de fantôme quand la nuit tombe, et qu’on se tient dans une maison isolée, à la lisière d’une forêt sombre bordant un cimetière gothique.
   
L’addition des conjonctions est donc déterminante pour se sentir concerné par le frisson que l’auteur cherche à faire passer.


Le passage des années 2000 a catalysé un peu plus la montée des risques.
Au risque nucléaire classique qui nous ferait maintenant presque rigoler s’est ajouté aux fils des années un ensemble de défauts majeurs, dont je vous ferai la grâce.

Une liste longue comme un jour sans fin, qui ont entraîné une vraie décote de notre vieille planète.
    L’apocalypse a une imagination débordante. Les risques endémiques, environnementaux se sont par exemple subdivisés en tant de causes et d’incidences qu’il est impossible d’être exhaustif.
    Un crash test avec un météorite tombant sur une réacteur nucléaire ressouderait tous nos problèmes existentiels, et de crédit immobilier.

Prions pour qu’aucun contrôle technique exigé par un administratif zélé ne la mette au rébus ! Heureusement, rien n’est prévu à cet effet.

L’état préférera se pencher sur votre vieille caisse, en renforçant à partir de Mai les points de contrôle.
De même on envisage de faire passer maintenant un permis aux propriétaires de tronçonneuse.
    La sécurité, c’est bien, mais seulement quand ça profite au marché, pas quand elle le contrarie.
    Et alors, diront certains, pourquoi ne pourrait on pas s’en sortir ?.. Il suffit de vouloir…. « Rien n’est impossible aux âmes bien nées, etc... »

    C’est la méthode Coué, ou encore celle de « Jules Vernes  »... Les livres d’anticipation de cet auteur positif, toujours positif, présentent à l’infini des héros combatifs, impétueux, n’ayant aucun état d’âme, juste troublés dans la marche en avant, macronienne, par une ampoule au pied, celle qui éclairera bientôt leur chemin. Car la technologie appliquée, leur courage, leur débrouillardise, et leur opiniâtreté leur permettent toujours de se sortir des situations les plus compliquées, même au centre de la terre. Ce sont des romans initiatiques, à l’instar du grand modèle que furent les aventures d’Ulysse, mais à la rencontre de la science et de l’imaginaire, une tentative de réconciliation entre littéraires et scientifiques.


 On comprendra pourquoi Jules Verne brille toujours autant dans les collections « Jeunesse » : Pour faire plaisir à tous les profs, et même à ceux de maintien, s’ils existaient encore...

C’est tout juste si un raz de marée bousculerait le protocole d’un repas, ou d’un échange « entre gens civilisés »….
   
En ce sens, même si Jules Verne fait office de pionnier de la science fiction, aucun des ses romans n’est un roman d’apocalypse.


Sans doute un parti pris, celui de son époque : La science allait tout résoudre. Pour encore quelques décénnies, les hommes ne doutèrent guère de leur invulnérabilité. C'est là une des raisons majeures du conflit de 14 : La guerre moderne semblait au service de chacun, au détriment de l'autre, installant chaque protagoniste dans une sorte d'ivresse. Et on le sait, l'abscence de doute est le pire danger !
     Hormis le paysage dévasté, ce qui caractérise autant les romans de fin du monde, ce sont donc les transformations psychologiques des survivants. D’un certain coté, ceux qu’ont traversé les deux dernières guerres ont vécu ce genre de choses.
C’était la fin d’un monde.
Le naufrage de l’humanité.
Même s’il existait encore des formes qu’on aurait pu appeler des hommes occupés à bouger, soulevant des cadavres gorgés de putréfaction pour leur arracher leur montre, ou leurs dents.
     Que voulez-vous ?
Il faut bien continuer à vivre, même dans la tombe.
Ces jours de Novembre d’armistice et de fête des morts me font un peu frissonner la mémoire. Parfois j’ai l’impression d’avoir un petit bout de mon grand-père qu’avait fait Verdun et la Marne en moi. Je ne sais pas ce qu’il lisait sur le front. Peut-on lire de la poésie quand résonne le canon ? Sans doute n’avait-il pas besoin de dose supplémentaire de science fiction pour tenir, mais plutôt de gnôle.


  Le livre admirable « Le grand troupeau » de Jean Giono, écrivain et poilu, est tout autant un livre d’apocalypse que les livres d'anticipation extrèmes. Il dépeindra de l'intérieur le quotidien de ces hommes qui n'arrêtent pas de mourir.
Ce grand troupeau mené par de mauvais bergers
http://bit.ly/2AxtKuX
   
1914 marque la fin d’un monde, l’arrivée de l’internationale du cynisme, et de ses grands barons, du monde ouvert à la mondialisation, avec ses planqués, et ses sacrifiés futurs.




   Jean Giono, le chantre de la haute provence, avec ses cieux et ses collines se dilatant dans le cœur des hommes, en sorti à jamais tétanisé par le cynisme, la violence présente et à venir.
Le pacifisme qu'on lui reprocha en 39 est en liaison avec le traumatisme de 14. Ce "Plus jamais ça !"... Car un homme ne peut vivre deux fois la fin du monde. Il y eut quelques artistes pourtant pour valoriser la guerre de 14.

  L'idée était qu'elle allait régénérer l'espèce, comme le crut un moment le peintre Franz Marc, par exemple. C'était avant de mourir, de finir par la trouver absurde.

De même Fernand Léger qui joua à l'esthète : " « Il n’y a pas plus cubiste qu’une guerre comme celle là qui te divise plus ou moins proprement un bonhomme en plusieurs morceaux et qui l’envoie aux quatre points cardinaux. »...





   Otto Dix, par contre, ancien soldat, témoignera à travers ses peintures gothiques, de cette expérience apocalytique, rejoignant le monde halluciné de Jérome Bosch. Ses gargouilles et ses diables nationalistes ont un masque à gaz sur le nez. Des lambeaux de chair sont accrochés aux arbres. Les humanités ont disparu. il ne reste que le rire affreux des gueules cassées.
       Après guerre, il continuera à témoigner de ce monde morcellé, psychotique, en proie à la violence extrème, avec des culs de jatte montés sur des caisses à savon, faisant la manche au coin des rues, pendant que dans les salons, les maitres de la guerre et les banquiers palpent le cul des femmes qui leur sont offertes.


  Dix n'arrêtera pas de souligner cette union putride entre le sexe, la mort, et la puissance, l'un au service de l'autre, dans une sorte de danse macabre et perverse.

Inutile de dire qu'il figurera en bonne place dans le musée des peintres dégénérés du troisième reich.
 

Les histoires de mon grand-père résonnent encore dans ma mémoire comme dans un tunnel, ou des tranchées lugubres, et ces puits de boue dans lesquels il tombait parfois. Par trois fois il vit son cheval crever sous lui. C’est des histoires que je traîne depuis tout gamin. Je les ai greffées sur les livres que j’ai lus, comme des membres fantômes douloureux que j’avais besoin d’accrocher quelque part.


    C’est ainsi que j’ai mis la tête de mon grand-père sur le héros de « la machine à explorer le temps » de H.G Wells. Peut-être aussi parce que sa vieille moto des années quarante, une vénérable « Motobécane » ressemblait comme deux gouttes d’eau croupies à ce drôle d’engin que notre héros enfourchait, avant de faire tourner le compteur des siècles…..

    J’avais pas dix ans quand j’ai lu ce truc de dément, comme on dit maintenant. Le vent soulevait mes cheveux, assis sur le siège arrière de la bécane, pendant qu’autour de nous bougeaient les astres sur leur axe, et qu’Einstein me tirait la langue. Entre parenthèses, ce bouquin fut écrit 10 ans avant la découverte de la loi de la relativité du grand Albert ! http://bit.ly/2mfTdqm ...



     Un petit tour en arrière au pays des dinosaures avant de remonter de justesse sur l’engin et de mettre le cap vers l’avenir…. Voilà, lisez le. Un siècle et ça n’a pas pris une ride…..http://bit.ly/2mf9VGu


 A un moment, mon grand-père, je veux dire le héros, arrivé dans des temps futurs post atomiques fait la connaissance de créatures diaphanes, tranquilles et douces, vivant au milieu des décombres.
   Dés que la nuit tombe, par contre, ces elfes deviennent apeurées, fuyantes, se planquent dans les palais lézardés, derrière les livres abandonnés. Car des puits sans fond montent des entrailles rouillés de la terre des créatures aux yeux rouges et aux dents acérées..Non, ce ne sont pas les boches exécrés... On apprend que ces loups garous sont les descendants de vils prolétaires, attachés à leur puits de mine depuis la grande catastrophe.

    H.G Wells fut celui qui donna au genre ses lettres de maturité. Écrivain de sensibilité socialiste, pacifiste, pensant la politique, le clivage social, mais aussi la science et ses conséquences. Wells a beaucoup influencé Orwell et Huxley dans leur vision pessimiste de l’avenir.

Ces livres d’anticipation prédisent l’événement des manipulations génétiques sur le vivant, dans «  L’ile du docteur Moreau  »…http://bit.ly/2jimGyW

     Bien sûr, ce n’est pas Wells qui a inventé le thème du pire des mondes possible, et affolé et passionné les hommes, en leur mettant le nez dans leur crotte. Redonnons à Noë, l’ancêtre du capitaine Nemo ce qui lui appartient !
L’avenir est un long passé, sauf pour les dinosaures.


     L’an mille fut l’annus horribilis ! 
On pensait que l’alignement des trois zéros sur le cadran du flipper cosmique coïnciderait avec l’apocalypse. Une sorte de tilt. Game over !.... Un thème donc absolument pas nouveau dans le paysage, mais qu’on aurait bien tort pour cette raison de banaliser, tout en frissonnant de plaisir, comme à l’écoute d’histoires un peu gores, mais qui nous ne concerne pas, juste issu de l’imagination d’un écrivain de SF un peu schyzo genre Philip K.Dick, avec en couverture une peinture de Jérome Bosch.


    Inutile de vous faire un dessin ! Force 10 sur un camp de réfugiés climatiques ! Nous allons bientôt devoir devoir grimper les escaliers des plus hautes tours des cités, afin d’échapper à la montée des eaux. C’est comme ça que se termine ce récit déjanté que fit Anthony Burgess en 82, l’auteur « d’orange mécanique » avec les vagues montant les avenues de Manhattan : « Dernières nouvelles du monde  ! »….

 Montée des eaux, réchauffement. Je m’étais bien amusé, ado, en lisant « Sécheresse » de Ballard. Cet écrivain anglais semblait voir le monde futur avec le même discernement qu’une capitaine de sous marin allemand envoyant ses torpilles sur un bateau de civils. http://bit.ly/2hm9Ye8
     C’était en 74... L’année de la chanson « le sud » de Nino Ferrer, qui parlait de paix, mais qui entrevoyait la guerre, la fin d’un monde, des poissons rouges. « C’était pourtant bien... »
Un slow langoureux où l’on pouvait serrer sa copine attendrie, la réconforter des temps méchants à venir !  Mais sans y croire vraiment. C'est que les étés pourris de Normandie me rendait un peu sarcastique à propos de cette curieuse idée de réchauffement.
On est toujours victime de sa localisation, et on souvent les idées liées à ses intérets. J’étais climato-sceptique sans le savoir encore, tout à fait réac ! Un mot terriblement branché en ces temps là.
      Avec le temps je vois bien combien Ballard avait vu juste. Combien l’anticipation s’est salement rapprochée. Pas vraiment comme on l’avait imaginé, version « San Francisco s’écroule... » de Maxime Le Forestier. Le grand soir qu’on imaginait venir, nimbant de couleurs diaphanes et douces, la petite maison bleue accrochée à la colline, à mauvaise mine, et tire sur le jaune hépatique, genre cirrhose décompensée. La nuit venue des ombres grimaçantes rentrent par les carreaux cassés. Voilà longtemps qu’ils ont oublié ce qu’était une clé….. Méfiez-vous vraiment des zombies qui vivent là... Si vous entrez je vous conseille d’avoir un flingue chargé, et de vous méfier d’une certaine Sylvia, revenue on ne sait d’où, porteuse de toutes les maladies sexuellement transmissibles.


  Les voyages ne font plus rêver, et sont porteurs de risques.

 Déjà Swift, dans son "Gulliver", sans doute le premier livre de science fiction nous avait prévenu des surprises à venir.
Un livre étonnant qu'on rattache malheureusement souvent à la littérature pour gosses, et qui nous parle de la manipulation politique sur les peuples, appelées à se haïr. Orwell y puisa maintes idées pour son 1984.
    

Les frelons asiatiques, les silures infestant les rivières, et autres plantes invasives sont les dernières curiosités d’un monde ouvert ayant confondu opportunité de l’ouverture des frontières, sans garde fou, avec l’utilité des protections.

      Les géants et les lilluputiens que Swift avaient imaginé ont rompu leurs amarres, et se cotoient maintenant dans ce caravanseraï baroque, où les lois du marché sont les seules règles divinisées.
Même si un dessinateur comme MANARA en a adouci l'appreté....
    
N’importe quel gamin ayant retiré les gardes boue de son vélo pour avoir l’air d’un coureur comprendra son erreur quand il passera dans une flaque d’eau.. Mais j’ai peur que cette comparaison fasse un peu datée. On s’aperçoit à ce genre de détail que l’on a changé d’époque, que les gens vous regardent comme un « has been ».
     Nous sommes loin de ces années un peu nunuche c’est vrai, où l’on prônait l’amour libre, et le flower power. .
On se tenait par la main, pour le grand bénéfice de certains prédateurs, qui vous conseillait d’être cool, absolument moderne !

C’était tout profit pour ces grands paranos, Dark Vador aux cheveux longs, grattant nonchalamment sur leur guitare. Sans aller jusqu’aux excès mortifères du gourou Jim Jones http://bit.ly/2AB8eWL . David Hamilton fit grand profit de l’emprise qu’il possédait sur des gamines en fleurs, et posait parfois son reflex sur le bord du lit. http://bit.ly/2hryvCv

     Un précurseur, mais pas dans le sens comme on l’imaginait alors. 

 Le halo vaporeux dont il entourait ses modèles aurait du être pris au premier degré.
     Peut-être que je ne devrais pas parler de ce type. Dire que j’ai maté les photos de ces adolescentes naïves poussées souvent par des parents arrivistes, en les trouvant « artistiques ». Des choses qu’on savait pas qu’on a appris plus tard. J’avais accroché un poster au dessus de mon lit. Je vous jure monsieur le procureur : Je me suis fait abuser ! Je porterai plainte contre ce sale type s’il n’était pas mort.

« Avec le temps va tout s’en va disait Léo Ferré ... Même les plus chouettes souvenirs-ça prend une de ces gueules »…..

    Well ! Stoppons la nostalgie, regardons les choses en face, soyons des héros de Jules Vernes, et non ce doux dingue de Phillipulus enveloppé dans un drap, tapant sur une gamelle pour pronostiquer la fin des temps, dans « L’étoile mystérieuse !
   « C’est le chatiment :... Faites pénitence !... La fin des temps est venue !.. »

     On devrait porter plainte contre Hergé pour cruauté mentale envers les mineurs…
   



Et encourager ceux-ci à retrousser leurs manches pour réparer le monde, et nous le rendre, bien meilleur que dans l’état dans lequel on leur a livré !





Commentaires