Accidents fictifs : De la prison ferme pour une avocate et deux médecins.

Accidents fictifs : De la prison ferme pour une avocate et deux médecins.


Escroquerie d'assurance, déclarant des accidents de la route fictifs.

Le 21/05/2025

Une avocate, deux médecins, une assistante juridique et plusieurs intermédiaires ont été condamnés à des peines de prison allant jusqu’à deux ans pour leur implication dans un réseau spécialisé dans la falsification de dossiers d’accidents de la route. 

Des certificats médicaux truqués et des montants d’indemnisation astronomiques sont au cœur de cette affaire qui met en lumière un système bien rodé, démantelé grâce à une enquête conjointe de la DGST et de la BNPJ. 

La Chambre correctionnelle du tribunal de première instance de Rabat a rendu son verdict hier, lundi 19 mai 2025, dans une affaire de falsification de dossiers d’accidents de la circulation impliquant plusieurs professionnels du droit et de la santé.

Selon le quotidien Al Akhbar, dans sa livraison de ce mercredi 21 mai 2025, cette affaire, qui a suscité un vif émoi dans les milieux judiciaires, concerne un réseau structuré composé d’une avocate, de deux médecins, d’une assistante juridique, d’un agent de la protection civile et de deux intermédiaires.

Les peines prononcées vont de quatre mois à deux ans de prison ferme.

Au terme des délibérations, le tribunal a condamné l’avocate, considérée comme la principale instigatrice du réseau, à deux ans de prison ferme.

L’un des intermédiaires, présenté comme un acteur clé du dispositif, a été condamné à dix-huit mois de prison ferme.

Les deux médecins impliqués ont chacun écopé d’une peine d’un an de prison ferme, tandis que l’assistante juridique de l’avocate a été condamnée à quatre mois de réclusion.

L’ensemble des accusés étaient poursuivis pour falsification de documents médicaux, escroquerie, et constitution d’une organisation criminelle en vue de détourner des fonds à travers des dossiers d’indemnisation frauduleux.

L’enquête a révélé le mode opératoire sophistiqué du réseau.

Les intermédiaires repéraient des victimes d’accidents de la route dans les rues de Rabat et d’autres villes, puis les mettaient en relation avec les autres membres du groupe.

Grâce à la complicité d’un conducteur d’ambulance relevant de la protection civile, les victimes étaient accompagnées à l’hôpital. C’est là que les deux médecins intervenaient pour établir de faux certificats médicaux, comportant des indications exagérées sur la nature des blessures et la durée de l’incapacité temporaire.
Une fois ces documents en main, l’avocate et son assistante juridique prenaient en charge le montage des dossiers de demande d’indemnisation à adresser aux compagnies d’assurance.

Elles exploitaient leur maîtrise des procédures juridiques liées aux litiges d’accidents de la circulation pour constituer des dossiers apparemment solides, mais fondés sur de fausses informations.

Selon les estimations des enquêteurs, ce réseau aurait ainsi réussi à détourner près de 80 millions de dirhams entre 2023 et les quatre premiers mois de l’année 2025.

L’ampleur des sommes en jeu témoigne du niveau de structuration et de sophistication de cette fraude.

L’affaire a été dévoilée à la suite d’une enquête menée par la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), dont les services ont transmis les premiers éléments à la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ).

Sur instruction du parquet, la BNPJ a placé plusieurs suspects en garde à vue et mené des investigations approfondies pendant trois jours.

À l’issue de cette enquête préliminaire, les mis en cause ont été présentés au procureur général du Roi près la Cour d’appel de Rabat, qui a ensuite transmis le dossier au tribunal de première instance, juridiquement compétent.

Le juge d’instruction a ordonné la détention provisoire pour quatre personnes : l’avocate, son assistante juridique, ainsi que les deux intermédiaires. 
Les trois autres prévenus "les deux médecins et l’agent de la protection civile" ont été poursuivis en liberté, après avoir versé respectivement 50 000 dirhams de caution pour les médecins et 5 000 dirhams pour l’agent.

Lors de la dernière audience, Me Aziz Rouibeh, bâtonnier du barreau de Rabat, a pris la parole en tant que partie civile.
Dans une plaidoirie, remarquée, il a vivement dénoncé les agissements de l’avocate poursuivie, qu’il a qualifiés de violation grave de la déontologie de la profession.

Selon lui, ces pratiques portent atteinte non seulement à l’éthique du métier d’avocat, mais également au principe fondamental d’égalité des chances et à la noblesse de la mission judiciaire.

Source :  Al Akhbar

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