Pourquoi je n’ai jamais aimé Thierry Ardisson, au contraire…
Publié le 15 juillet 2025

Le jour où Michel Drucker décédera, j’aurai l’impression qu’une nouvelle part de ma jeunesse s’en sera allée. Car Michel Drucker a toujours eu de la tenue et il a su recevoir ses invités comme il se devait. Mais la mort de Thierry Ardisson ne m’émeut en aucune manière.
Alors si j’avais l’élégance du Menhir, je lui emprunterais cette phrase prononcée lorsqu’il venait d’apprendre la mort de Jacques Chirac : « Mort, même l’ennemi a droit au respect. » Mais le Menhir, comme il me l’avait dit lui-même lors d’une rencontre, demeurait un soldat, avec tous les codes d’honneur inhérents, pas moi.
Ardisson était un cynique, égocentrique, envieux et cruel à la fois, sans aucune forme d’empathie pour qui que ce soit à part lui-même. Ses entretiens relevaient presque toujours de l’abjection la plus décomplexée, revendiquant une vulgarité joyeuse, sans la grandeur ou le courage du porteur de l’épée éponyme, Charlemagne.
Baby-boomer décadent, avide de succès à n’importe quel prix, il ne reculait devant aucun expédient pour parvenir à ses fins, motivé par une soif de vengeance sur le destin – ayant longtemps eu honte de ses origines modestes –, traitant tout et tout le monde avec une désinvolture ignoble, tout ça pour faire de l’audience, et peu importait les dommages collatéraux.
Je ne crois pas être un adepte du néo-féminisme, loin de là, mais suggérer à Judith Godrèche de tourner un porno avant de déclarer qu’il n’irait pas voir ses films si elle n’y était pas nue, c’était assez minable, sachant à l’époque les ravages que Benoît Jacquot avait exercés sur elle.
Comme ses semblables, Ardisson était un rebelle en carton qui se serait pissé – voire mieux – dessus sur un champ de bataille mais qui croyait donner le change avec une posture je-m’en-foutiste décomplexée. Adepte de toutes les défonces, il représentait pour moi – et beaucoup d’autres – la quintessence du décadentisme des années Mitterrand. Et que l’on ne vienne pas me parler d’humour, il en était absolument dépourvu, incapable de se hisser au rang d’un Michel Audiard. Même ses slogans publicitaires étaient mauvais. Car Ardisson manquait à ce point de talent qu’il se croyait obligé de plagier les œuvres des autres.
Piètre présentateur, répétant les mêmes poncifs du bas de la ceinture, refusant de se remettre en question malgré la réalité des faits, à savoir qu’à force il ennuyait son monde. Et lorsqu’il était éconduit, l’injure n’était pas loin, tout comme son double Laurent Baffie, sorte de mauvais comique et digne tête à claques. Ainsi, lorsque le groupe Canal Plus avait interrompu son émission sur C8, Ardisson s’en était allé pleurnicher sur d’autres médias, balançant un très prévisible et convenu : « CNews fait campagne pour l’extrême droite. » Et ça se disait royaliste tout en tapinant pour la gauche !
Ardisson amusa un temps la galerie micro-cosmique parisienne par ses saillies faciles et sa fausse compassion destinée à obtenir des aveux gênants de ses invités qu’il trahissait régulièrement. Et lorsque cela ne suffisait pas, il versait dans la provocation d’adolescent attardé, proposant par exemple à Brad Pitt un « plan cul » et de la dope à l’écran, auquel l’intéressé répondit sobrement qu’il était marié. Quel niveau, non ?! Aussi, le public finit par se lasser de ces sorties, toujours les mêmes, sans aucun contenu puisque le guignol en noir monopolisait la parole presque tout le temps et le revendiquait.
Avec ses invités, il pouvait aussi se défoncer la tronche et avec toutes sortes de substances, au point que certains, comme Frédéric Beigbeder, mauvais écrivain érigé en génie, s’effondra une fois dans sa loge et son vomi, incapable de rejoindre le plateau. Le même Beigbeder, dont la lune de miel avec Ardisson se brisa un beau jour, le premier invectivant le second en ces termes : « Alors que Thierry Ardisson rêvait d’être écrivain, rien de ce qu’il prononce n’est de lui : ses prompteurs, ses blagues et ses questions sont rédigés par des pigistes. Tout ce qu’il a fait depuis trente ans, c’est lire des textes écrits par d’autres. Il n’est pas surprenant que son obsession consiste désormais à éditer des coffrets de compilations de ses vieilles émissions – ce romancier frustré souhaite à tout prix occuper une place sur votre étagère. » Pour une fois je veux bien croire ce petit bobo de Beigbeder.
J’avais déjà brossé le portrait d’Ardisson dans les colonnes de Riposte laïque et je ne vois rien à retirer après sa mort :
Lien vers : https://ripostelaique.com/le-has-been-frustre-ardisson-invective-bollore-et-hanouna.html
La mort n’absout pas tout, et le jouisseur sans entraves Ardisson ne mérite aucune homélie post-mortem. Qu’il aille donc au diable ou ailleurs avec son impertinence de bourgeois planqué et dont le souvenir s’étiolera au fil du temps pour n’en retenir à peu près rien.
Enfin, si l’on peut faire rire de tout, il faut au moins en avoir les moyens, et Ardisson n’a jamais été un Monty Python, juste un monsieur p’tit con…
(Et comme les guignols sont une grande famille, voici ce que l’Élysée a pondu comme hommage immérité : « Thierry Ardisson imposa pendant des décennies au paysage audiovisuel français une voix, une silhouette, un style, un esprit, teinté de curiosité et d’irrévérence. »)
Par Charles Demassieux.
Publié le 15 juillet 2025

Le jour où Michel Drucker décédera, j’aurai l’impression qu’une nouvelle part de ma jeunesse s’en sera allée. Car Michel Drucker a toujours eu de la tenue et il a su recevoir ses invités comme il se devait. Mais la mort de Thierry Ardisson ne m’émeut en aucune manière.
Alors si j’avais l’élégance du Menhir, je lui emprunterais cette phrase prononcée lorsqu’il venait d’apprendre la mort de Jacques Chirac : « Mort, même l’ennemi a droit au respect. » Mais le Menhir, comme il me l’avait dit lui-même lors d’une rencontre, demeurait un soldat, avec tous les codes d’honneur inhérents, pas moi.
Ardisson était un cynique, égocentrique, envieux et cruel à la fois, sans aucune forme d’empathie pour qui que ce soit à part lui-même. Ses entretiens relevaient presque toujours de l’abjection la plus décomplexée, revendiquant une vulgarité joyeuse, sans la grandeur ou le courage du porteur de l’épée éponyme, Charlemagne.
Baby-boomer décadent, avide de succès à n’importe quel prix, il ne reculait devant aucun expédient pour parvenir à ses fins, motivé par une soif de vengeance sur le destin – ayant longtemps eu honte de ses origines modestes –, traitant tout et tout le monde avec une désinvolture ignoble, tout ça pour faire de l’audience, et peu importait les dommages collatéraux.
Je ne crois pas être un adepte du néo-féminisme, loin de là, mais suggérer à Judith Godrèche de tourner un porno avant de déclarer qu’il n’irait pas voir ses films si elle n’y était pas nue, c’était assez minable, sachant à l’époque les ravages que Benoît Jacquot avait exercés sur elle.
Comme ses semblables, Ardisson était un rebelle en carton qui se serait pissé – voire mieux – dessus sur un champ de bataille mais qui croyait donner le change avec une posture je-m’en-foutiste décomplexée. Adepte de toutes les défonces, il représentait pour moi – et beaucoup d’autres – la quintessence du décadentisme des années Mitterrand. Et que l’on ne vienne pas me parler d’humour, il en était absolument dépourvu, incapable de se hisser au rang d’un Michel Audiard. Même ses slogans publicitaires étaient mauvais. Car Ardisson manquait à ce point de talent qu’il se croyait obligé de plagier les œuvres des autres.
Piètre présentateur, répétant les mêmes poncifs du bas de la ceinture, refusant de se remettre en question malgré la réalité des faits, à savoir qu’à force il ennuyait son monde. Et lorsqu’il était éconduit, l’injure n’était pas loin, tout comme son double Laurent Baffie, sorte de mauvais comique et digne tête à claques. Ainsi, lorsque le groupe Canal Plus avait interrompu son émission sur C8, Ardisson s’en était allé pleurnicher sur d’autres médias, balançant un très prévisible et convenu : « CNews fait campagne pour l’extrême droite. » Et ça se disait royaliste tout en tapinant pour la gauche !
Ardisson amusa un temps la galerie micro-cosmique parisienne par ses saillies faciles et sa fausse compassion destinée à obtenir des aveux gênants de ses invités qu’il trahissait régulièrement. Et lorsque cela ne suffisait pas, il versait dans la provocation d’adolescent attardé, proposant par exemple à Brad Pitt un « plan cul » et de la dope à l’écran, auquel l’intéressé répondit sobrement qu’il était marié. Quel niveau, non ?! Aussi, le public finit par se lasser de ces sorties, toujours les mêmes, sans aucun contenu puisque le guignol en noir monopolisait la parole presque tout le temps et le revendiquait.
Avec ses invités, il pouvait aussi se défoncer la tronche et avec toutes sortes de substances, au point que certains, comme Frédéric Beigbeder, mauvais écrivain érigé en génie, s’effondra une fois dans sa loge et son vomi, incapable de rejoindre le plateau. Le même Beigbeder, dont la lune de miel avec Ardisson se brisa un beau jour, le premier invectivant le second en ces termes : « Alors que Thierry Ardisson rêvait d’être écrivain, rien de ce qu’il prononce n’est de lui : ses prompteurs, ses blagues et ses questions sont rédigés par des pigistes. Tout ce qu’il a fait depuis trente ans, c’est lire des textes écrits par d’autres. Il n’est pas surprenant que son obsession consiste désormais à éditer des coffrets de compilations de ses vieilles émissions – ce romancier frustré souhaite à tout prix occuper une place sur votre étagère. » Pour une fois je veux bien croire ce petit bobo de Beigbeder.
J’avais déjà brossé le portrait d’Ardisson dans les colonnes de Riposte laïque et je ne vois rien à retirer après sa mort :
Lien vers : https://ripostelaique.com/le-has-been-frustre-ardisson-invective-bollore-et-hanouna.html
La mort n’absout pas tout, et le jouisseur sans entraves Ardisson ne mérite aucune homélie post-mortem. Qu’il aille donc au diable ou ailleurs avec son impertinence de bourgeois planqué et dont le souvenir s’étiolera au fil du temps pour n’en retenir à peu près rien.
Enfin, si l’on peut faire rire de tout, il faut au moins en avoir les moyens, et Ardisson n’a jamais été un Monty Python, juste un monsieur p’tit con…
(Et comme les guignols sont une grande famille, voici ce que l’Élysée a pondu comme hommage immérité : « Thierry Ardisson imposa pendant des décennies au paysage audiovisuel français une voix, une silhouette, un style, un esprit, teinté de curiosité et d’irrévérence. »)
Par Charles Demassieux.
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