Les bulletins blancs de l’armée algérienne.
Chaque fois
qu’ils ont été remis en cause elle n’a pas hésité à tirer au propre
comme au figuré
Les militaires qui ont le droit de voter en
Algérie, ont massivement mis des bulletins blancs dans les urnes lors
des dernières législatives. Pareille attitude mérite explication et
analyse. Auparavant, il faut souligner que ces élections n’ont pas
drainé grand monde vers les bureaux de vote et ont été largement
dénoncées par les partis autres que ceux qui sont au pouvoir.
Le FLN de
Abdelaziz Bouteflika qui noie son unicité dans un pseudo pluralisme, et
son allié, le Rassemblement National Démocratique d’Ahmed Ouyahia qui
occupe en même temps le poste de directeur du cabinet du président, ont
remporté ces élections dans la défiance généralisée des électeurs
algériens. Dès lors, ne serait-il pas tentant d’en déduire que les
militaires, contraints par discipline de se rendre aux urnes, ont suivi
cette défection en votant blanc ?
C’est une lecture possible, mais qui
expose les hommes de troupe, les sous-officiers et les officiers aux
foudres d’une hiérarchie qui n’est pas réputée pour sa tendresse. Aussi
peut-on conclure comme l’ont relevé plusieurs observateurs, que le corps
de l’armée a obéi à un mot d’ordre, le vote blanc, qui n’est pas dans
les habitudes des militaires algériens, depuis toujours très impliqués
dans l’ordonnancement politique de leur pays où ils trônent en faiseurs
et défaiseurs de rois.
Dans l’opacité algérienne, il y a plusieurs façons
de lire ce vote blanc des militaires. L’une d’elles est de supposer que
le général Gaïd Salah, chef de l’Etat Major, signifie aux clans en
lutte pour le pouvoir qu’il renvoie tout le monde dos à dos en
s’arrogeant le droit, le moment venu, de faire prévaloir sa primauté à
travers celle de l’armée. « Il en a toujours été ainsi et il n’y a
aucune raison pour que ça change aujourd’hui » semble-t-il leur dire.
La
deuxième lecture, entre autres, est que le vote blanc est une manière
de proclamer la neutralité de l’armée face aux différents prétendants.
Elle a l’habitude de ce genre de subterfuges et de trompes l’œil pour se
placer au-dessus de la mêlée et de se positionner en gardienne du
temple pour mieux le contrôler. On peut en conséquence voir dans son
attitude aux dernières législatives plusieurs significations. Cependant
une seule chose est sûre : pas plus qu’hier, cette armée qui n’a jamais
reculé devant rien, même devant les pires atrocités, n’est prête
aujourd’hui à céder une parcelle de ses pouvoirs.
Chaque fois qu’ils ont
été remis en cause, elle n’a pas hésité à tirer au propre comme au
figuré. En 1992 lorsqu’elle a plongé le pays dans une longue guerre
civile. Et plus récemment encore quand l’ancien secrétaire général du
FLN, Amar Saadani, considéré alors comme l’homme du président, a prôné
la construction d’un « Etat civil » avant d’être débarqué de son poste
en octobre 2016.
Son limogeage sans préavis a été interprété comme un
signal fort du clan des généraux marquant les lignes à ne pas dépasser.
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